"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

Construction d’un Bénin émergent :

26 février 2008 -La presse du jour

Comment les ministres de Boni Yayi compromettent le développement

Le Bénin pourra-t-il se développer un jour ? La question mérite bien d’être posée. L’espoir suscité au sein des Béninois par le discours du Chef de l’Etat à son investiture commence par s’estomper. A l’allure où vont les choses aujourd’hui, on a en tout cas des raisons de s’inquiéter. Entre la vision du Chef de l’Etat et sa mise en application, le fossé se creuse tous les jours. Et il ne serait pas exagéré de dire d’ailleurs que ce sont les ministres de Boni Yayi qui compromettent le développement du Bénin avec naturellement la complicité de leur Chef. En vérité, l’ambassadeur allemand, son Excellence Albrecht Conze qui s’en est pris dans un langage direct aux députés à la sortie de l’audience que lui a accordée le président de l’Assemblée Nationale s’est trompé de cible. Ses amitiés avec le président Boni Yayi et son gouvernement ne devraient pas l’amener à ne pas dire l’autre pan de la vérité. Dans le cadre de l’accélération de l’investissement extérieur au Bénin, comment les députés peuvent-ils voter des lois ou ratifier des accords si le gouvernement qui a besoin de ces instruments pour conduire son programme de développement ne fait pas les premiers pas ? Dans sa déclaration à la presse, le diplomate allemand aurait pu faire ressortir cette vérité-là et il aurait ainsi fait une bonne analyse. Soit ! Depuis bientôt trois mois, les ministres de Boni Yayi, à l’exception de Pascal Iréné Koupaki, se baladent à travers le pays. Ils sont en campagne pour les prochaines élections municipales et communales. Pendant longtemps, ils ont faire croire à ceux qui les dénonçaient que leur tournée s’inscrivait dans le cadre de la stratégie mise en place par le gouvernement pour expliquer aux populations les mesures prises pour lutter contre l’inflation. Malheureusement, la décision prise le 15 février dernier par le président de la République et qui répartit les ministres par zone dans le cadre de la préparation des prochaines élections municipales trahi honteusement cette version qui était servie à la population. Quel type de développement du Bénin ces ministres-là peuvent-ils impulser si tout le temps, ils vont s’occuper de ce qui ne les regarde pas, comme les élections locales ? Est-ce qu’il ne serait pas bon qu’ils s’occupent enfin des dossiers qui s’amoncèlent sur leur table et qui freinent l’entrée des capitaux étrangers au Bénin, comme le dénonce l’ambassadeur allemand ? Dans certains ministères, plusieurs dossiers traînent parce que le ministre est constamment absent. Et s’il n’est pas en mission officielle à l’étranger pour le meilleur des cas, il est sur le terrain en train de parler politique, de mobilisation des populations pour soutenir le Chef de l’Etat le Dr Boni Yayi. L’image qu’ils projettent souvent à la télévision est pitoyable. C’est comme si leur rôle est de faire les louanges du chef de l’Etat alors qu’au Parlement, ils sont attendus pour accélérer les procédures de vote de loi portant par exemple sur l’allègement fiscal et des accords à ratifier.

Priorité au « griotisme »

Aujourd’hui, tous les ministres du gouvernement, à l’exception de Pascal Koupaki qui ne se mêle pas de ces cinémas-là, se sont transformés en griots du Chef de l’Etat. Les discours qu’ils tiennent démobilisent même les militants plutôt que de les mobiliser. La colère des députés Fcbe et celle des populations de certaines localités du Bénin trouvent leur raison d’être dans la manière dont le pays est géré. En conseil des ministres, des instructions sont données afin que tel ou tel autre problème touchant directement la couche sociale soit résolu. Mais, plusieurs mois après, le problème est sans solution. Le cas de la route Akpro Missérété-Adjohoun-Kpédékpo qui continue de défrayer la chronique est édifiant. En juin 2007, le Chef de l’Etat qui était sur le chantier a donné des instructions pour que les goulots d’étranglement soient levés. Des mois après, on a fait l’amer constat selon lequel les travaux sont abandonnés par l’entreprise à qui satisfaction n’a pas été donnée. A qui la faute ? Indubitablement au ministre des transports et à son homologue de l’économie qui passent tout leur temps à être dans des meetings politiques. Si la route Comè-Bopa-Zougbonou est en souffrance, ce n’est certainement pas à cause de l’entrepreneur seul. C’est parce que le ministère des transports et des travaux publics qui doit jouer le gendarme derrière lui pour l’intérêt de la population lui a laissé les mains libres et a, à la limite, peur de prendre ses responsabilités et de rendre compte à la Haute autorité. Au même moment qu’ils veulent que les populations accordent leur soutien à Boni Yayi, les ministres du gouvernement ne font rien pour traduire ces soutiens dans les actes. Ils trompent le Chef de l’Etat en entretenant la filière juteuse des marches de soutien et des meetings téléguidés. Lors des meetings qu’ils organisent ou font organiser pour parler des mérites du Chef de l’Etat que tout le monde connaît déjà, les ministres de Boni Yayi ne mettent pas le peuple au travail. Dans les villages, les paysans qui étaient habitués à aller au champ très tôt les matins sont obligés d’attendre ces ministres-là qui ne s’amènent qu’après des heures. Résultat, après les meetings et les marches, plus de champ pour les paysans qui sont pourtant la sève nourricière de la nation. Cette façon de faire qui est la mode depuis que le Chef de l’Etat a pris fonction ne peut que faire accentuer la pauvreté. Le risque que le Bénin ne soit plus autosuffisant est là puisqu’on empêche les paysans d’aller au champ à temps. En définitive, le développement ne peut que prendre un coup. On ne doit donc pas s’étonner de l’inflation galopante dans la mesure où l’offre commence par devenir inférieure à la demande.



28/02/2008
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