"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

Développement des moyens de transports

Il était une fois le peuple du rail

mardi 12 février 2008

Arimi CHOUBADE

Rédigé le 12 février 2008

 

Heureusement que Sembène Ousmane ne vit plus et n’est pas citoyen du Bénin du changement sinon les Bouts de Bois de Dieu n’aurait jamais existé. Le célèbre écrivain n’aurait jamais connu ce peuple du rail qui lui a inspiré ce grand classique de la littérature africaine. Parce qu’au Bénin du changement le train ne vit plus, anéanti par la rouille de la démagogique et du clientélisme. Au grand dam de toute cette sociologie de la dorsale ferroviaire qui partage le Bénin de part en part, de la lisière de Parakou jusqu’à Cotonou.

Une dorsale qui a donné naissance à des dizaines et des dizaines de villages. Des milliers de pauvres hères lui devaient la survie depuis des décennies. Les Béninois d’une certaine génération connaissent parfaitement ces décors pittoresque qui sortent de la brousse avec pour tout vestige ces baroques coloniales décrépites et vétustes servant de gare. Toute cette économie du rail qui a résisté à toutes les grandes crises sociopolitiques se meurt alors que le Bénin serait aujourd’hui plus proche de l’ « émergence » que de la déprime.

La hausse exponentielle du flux des zémidjans sur les routes urbaines du pays donne une petite idée de ce que devient ce peuple du rail de nos jours. Désoeuvré, oublié, abandonné, livré à l’exode. Il n’a jamais vu les bons amis Indiens qui devraient renforcer le parc de locomotives comme annoncé à l’occasion d’une des visites spectacles du docteur-président sur les ruines de ce qui reste du siège de l’Organisation commune Bénin-Niger (Ocbn). A l’allure où vont les choses, on risque de prévoir des sorties pédagogiques dans des musées avant d’enseigner le train et le rail aux petits écoliers.

Le régime du changement n’est certainement pas responsable de tous les péchés de la béninoiserie. Mais, il est coupable d’exploitation éhontée de la misère collective, et de communication grotesque et démagogique sur l’émergence. La Chine, l’Inde, le Brésil, l’Afrique du Sud et les dragons d’Asie ? Des années lumières du Bénin en matière de politique économique. C’est à eux que les normes internationales établies rapportent le terme d’ « émergent ». Pas à de minuscules chefferies aux régimes idolâtriques dont les commis passent le clair du temps à chanter les louanges du chef plutôt qu’à s’atteler aux grandes orientations de développement.

Comment émerger avec un système de transport aussi archaïque ? Tout le monde sait que d’ici-là, les populations choisiraient le dos d’âne à tous les autres moyens de locomotion entre Bohicon et Cotonou ou pour traverser la riche Vallée de l’Ouémé ou pour joindre entre eux les confins du Couffo. Sans réseau ferroviaire, fluviale et terrestre fiable. D’ailleurs le ministre des Transport s’active à apprendre à marcher aux citoyens à travers des marches de soutien au régime, en prévision certainement de la dégradation imminente, progressive et irréversible des voies encore disponibles. Aucun souci pour le grand chef, ses hélicoptères font bien l’affaire.

Au-delà du maintien de la riche sociologie entretenue par les ballets quotidiens de train sur la dorsale, c’est de la modernisation de l’économie qu’il s’agit. La vie chère n’aurait pas connu un retentissement si tragique et les routes en mauvais état feront moins de recettes macabres chaque année. Sans oublier le raccourci vers l’émergence, la vraie.

Et si l’émergence commençait par les rails plutôt que par les marches de soutien ?



15/02/2008
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