"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

Lutte contre la corruption :

Les vers du fruit

Rédigé le 13 novembre 2007

 

Sacrifier ses propres courtisans sur l'autel de la moralisation. Dire après cela que le docteur-président manque de courage politique. Deux élus de sa propre majorité parlementaire sous la menace d'une levée d'immunité ; un ancien ministre, allié circonstanciel, lui aussi en passe d'être envoyé devant les juges. Sans oublier la ribambelle de rabatteurs dont le dévouement à la cause « Cauris » ne pourra les sauver de la panoplie de mesures décidées en conseil des ministres : mise en débet, sanctions administratives, poursuite judiciaire.

Le gain de l'opération aurait été plus bonifiant pour le régime si ces deux personnalités n'avaient jamais été positionnées et défendues sur le terrain à l'occasion des législatives par le chef de l'Etat en personne. L'un a été pratiquement démis de ses fonctions alors que le second faisant déjà l'objet de vives polémiques. Ce qui ne les a pas empêchés d'être cooptés sur la liste confectionnée à la Marina. Comment ne pas s'interroger sur les motivations réelles de ces positionnements vu la virginité politique des deux concernés – on ne les a jamais aperçus sur une liste de candidatures auparavant ?

Ironie du sort, c'est le parti qui a combattu 10 ans durant le système qu'incarnaient Célestine Adjanohoun et Luc da Matha Santana qui a souffert de ces positionnements bizarres. Une campagne généreusement arrosée (on s'en doute), des militants débauchés à l'aide d'arguments non moins généreux, et le jeu est plié. Ce qui pose le bien-fondé des engagements partisans du changement teinté d'un mélange de genres difficilement perceptible par les faibles d'esprit comme moi.

Lorsque le président Kérékou quittait le pouvoir, croupissaient déjà derrière les barreaux un de ses anciens ministres, des magistrats, des fonctionnaires de l'administration centrale des Finances, un ancien Directeur général de la police nationale, de nombreux autres gradés de cette même police, une procédure pendante à l'encontre d'autres ministres dont l'un a été brièvement détenu à la prison civile de Cotonou avant d'être relâché. Des coups d'épée dans l'eau.

Au regard du droit positif béninois, la bonne foi d'un chef de l'exécutif ne suffit pas pour appréhender le phénomène du siphonage des fonds publics dans tous ses aspects. Crime économique ou enrichissement illicite ? Connaît pas ! Juste des délinquants économiques passibles d'un maximum de 5 ans. Moussa Traoré et épouse a écopé de la peine de mort au Mali tout près pour crime économique. Celui qui vole au trésor public 25 millions Cfa est un criminel puisqu'il prive des dizaines de femmes en couche d'une maternité entièrement équipée.

La gestion faite du dossier de l'ancienne banque d'Etat, la Bcb, rend compte des limites de notre législation en la matière. Ministres, anciens cadres de ladite banque jugés et condamnés ont pris congé de leurs geôliers depuis plus d'une décennie et jouissent tranquillement de leurs butins. Anciens agents licenciés et créanciers de la Bcb, quant à eux, n'ont que leurs yeux pour pleurer. Dans le cas d'espèce, même en cas d'incarcération, Adjanohoun, da Matha Santana et Fassassi conserveront leurs biens jusqu'au moment de leur élargissement.

La majorité parlementaire ne sera utile au chef de l'Etat dans sa croisade contre l'impunité et la corruption que lorsqu'il aura introduit un véritable projet de loi anti-corruption adaptée à toutes les techniques modernes de vols et de pillages des ressources de l'Etat.

Un processus à engager avec des vers dans le fruit.



19/11/2007
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