"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

Le Modèle ivre

Arimi CHOUBADE

9 mars

Plusieurs mois que la diplomatie béninoise fait le mort après les proclamations parternalistes du proconsul allemand. Disparue, la grandiloquence tissée autour de la grandeur, de l’honneur et du rayonnement de la nation. Trop heureux, les émergents se délectent de l’initiative prise par l’ambassadeur d’Allemagne près le Bénin de faire le ménage. Le grognon allemand ne s’adresse-t-il pas justement à cette maudite Assemblée nationale qui commence par offrir trop d’espace à la rébellion anti-cauris alors que tous les autres débouchés restent soigneusement verrouillés depuis avril 2006.

On ne peut pas reprocher à Albrech Conze de manquer de perspicacité. Tout premier venu aurait été frappé comme lui par ce besoin de légitimité du régime. Pour que ministres, conseillers du chef de l’Etat, députés et autres élus émergents en viennent à courir après des scènes de rue, c’est que la situation est plus que préoccupante. D’autant plus que les marches de soutien exercent un impact quasi nul sur les grèves, les rixes au sein de l’hémicycle, les attaques frontales à l’encontre de la tête de l’exécutif.

Un chef du gouvernement qui n’a rien trouvé de mieux que d’officialiser une partition de fait du pays. Lui se dit chef des « caurisants » pour qui il est prêt à construire des écoles, d’ouvrir des routes, d’ériger des centres de santé. A l’opposé des autres qui ne votent pas Fcbe et qui n’ont donc droit à aucune bienveillance du régime. Ce qui est dit est dit. Menace de saisine de la Haute cour de justice ou pas, le super directeur de campagne de sa chère liste de candidature pour les municipales n’arrête pas de faire planer ses hélicoptères au dessus des régions « hostiles ».

La panne de la République a cessé d’être un sujet tabou sous le Bénin émergent. Les diplomates en poste à Cotonou se rendent à l’évidence que seule la partie émergente de l’Etat dispose d’un chef, Yayi Boni. Un Etat-émergent différent de celui des syndicats, des partis politiques, des hommes d’affaires nationaux, des députés et maires non émergents, des consommateurs. L’Etat-émergent ne concerne que les marcheurs, les animateurs de meetings et de cérémonies de lancement de travaux et de poses de première pierre. Hervé Besenscenot obligé de jouer au médiateur a certainement pu se rendre compte de l’abysse qui sépare la Marina et les autres acteurs de la vie publique béninoise.

La légitimité à plusieurs vitesse consacrée par l’activisme partisan de l’homme du changement peut justifier l’autre activisme diplomatiquement provocateur. Ce qui ne devrait pas être fait au détriment des normes en la matière. Le modèle démocratique en Allemagne est loin d’avoir atteint la perfection. A l’instar d’autres pays européens comme l’Italie ou la Belgique. Je veux bien voir la réaction de Albrech Conze s’il venait à un des ses collègues béninois de s’épancher sur l’impasse politique allemande sur le perron de la Bundestag.

On connaît les capacités d’avaleurs de couleuvres des Africains. Les Béninois ne sont pas du reste. Ils en ont avalé de très gros de la part de leurs ancêtres ; c’étaient bien les Gaulois et non les Aryens.