Contrôle de la gestion de la Cena 2008:
La Cour
suprême déboute le ministre des Finances
In Matinal-26 mai 2008
La Cour suprême a rendu le 05 mai dernier un arrêt
dans l’affaire Jeannot Mathieu Agboton. Aux termes de l’article 3 du dispositif,
il ressort que le Ministre de l’Economie et des finances à violé le principe de
l’autonomie de la Cena en maintenant sous ordre le sieur Jeannot Mathieu Agboton,
employé par le Mef. Voici l’intégralité dudit arrêt.
Arrêt du 05 mai 2008
Au nom du peuple Béninois
Affaire : Jeannot Mathieu Agboton
Commission
électorale nationale autonome (Cena)
Ministère
de l’Economie et des Finances (Mef)
La Cour,
Vu la requête en date à Cotonou du 04 mars 2008, enregistrée au greffe de la Cour suprême le 05 mars 2008 sous le numéro 104/Gcs/ECM, par laquelle Monsieur Jeannot Mathieu Agboton sollicite de la Haute juridiction de dire que le Ministre de l’économie et des Finances, en demandant, d’une part au président de la Commission électorale nationale autonome (Cena) de solliciter le Ministre du Travail et de la Fonction Publique pour le recrutement des opérateurs de saisie devant servir à la Cena et en imposant d’autre part, le paiement des primes et indemnités aux membres des démembrements de la Cena par les receveurs percepteurs a violé la loi électorale n° 2007-25 du 23 novembre 2007 portant règles générales pour les élections en République du Bénin en son article 35 alinéa 2, le contenu du règlement intérieur de la Cena 2008 et le règlement financier de la Cena, objet du décret n° 2007-195 du 20 avril 2007 en ses articles 2, 6 et 13 ; Vu la lettre n° 0186/GCS/Ecm du 07 mars 2008, par laquelle le Ministre de l’Economie et des Finances a reçu communication de la requête et a été invité à produire ses observations et à produire à la Cour copie du règlement financier de la Cena, objet du décret n° 2007-195 du 20 avril 2007 ;
Vu la lettre n° 0187/Gcs/Ecm du 07 mars 2008, par laquelle le Président de la Cena a reçu communication de la requête et a été invité à produire ses observations et le règlement financier de la Cena, 9bjet du décret na 2007-195 du 20 avril 2007 -
Vu la lettre n° 0219/Gcs/Ecm du13 mars 2008, F laquelle Monsieur Jeannot Mathieu Agboton a été invité produire à la Cour copie du règlement financier de la Cena, objet du décret n° 2007-195 du 20 avril 2007 ;
Vu la lettre n° 078/Cena/ E08Pdt du 09 mars 2008, par laquelle le président de la Cena a produit à la Cour ses observations ;
Vu la lettre n° 2008/781-C/Mef/SP du 14 mars 2008, par laquelle Je Ministre de l’Economie et des Finances a produit également ses observations et copie du règlement financier de la Cena, objet du décret n° 2007-195 du 20 avril 2007 ;
Vu la lettre en date du 14 mars 2008, par laquelle Monsieur Jeannot Mathieu Agboton a également produit à la Cour le règlement financier de la Cena, objet du décret n° 2007195 du 20 avril 2007 ; Vu l’ordonnance n° 21/PR du 26 avril 1966 organisant le procédure devant la Cour suprême, remise en vigueur par la loi n° 90-012 du 1er juin 1990 ;
Vu la loi n° 2007-25 du 23 novembre 2007 portant règles générales pour les élections en République du Bénin ;
Vu la loi n° 2007-28 du 23 novembre 2007 portant règles particulières applicables aux élections des membres des conseils communaux ou municipaux et des membres des conseils de village ou de quartier de ville en République du Bénin ;
Vu toutes les pièces du dossier ;
Ouï le Conseiller Cyprien F. Boko en son rapport ;
Ouï l’ Avocat général René Louis Kèkè en ses conclusions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ; Examen du recours Sur la recevabilité
Considérant que le présent recours concerne la violation du principe de l’autonomie de gestion de la Cena par le Ministre de l’Economie et des Finances ;
Que ce recours peut être classé dans la catégorie de contentieux prévu à l’article 122, alinéa 2 de la loi n° 2007-25 du 23 novembre 2007 sous la désignation de « Tout le contentieux électoral » ; Que pour ce type de contentieux, la loi ne prévoit pas dl’ condition particulière de forme et de délai ; Considérant que dans ses conclusions, le parquet généra ! indique que ce recours serait recevable si le requérant justifie d’un intérêt à agir, caL« toute personne physique ou morale ayant la capacité juridique ne peut exercer n’importe quelle action devant la juridiction administrative » ; qu’il doit exister un certain rapport juridique entre le réclamant et la décision attaquée ; qu’il en découle que « si le justiciable ri’ a pas un intérêt direct et personnel à provoquer la disparition de l’acte, son recours est irrecevable et que le requérant ne justifie pas d’un intérêt direct et personnel à cette action ; Considérant que le contentieux élevé à propos de l’autonomie de gestion de la Cena s’inscrit dans le cadre de la gestion des élections locales et non dans le cadre d’un contentieux administratif ordinaire ; Qu’un tel recours peut être introduit par n’importe quel citoyen ; Qu’il v a lieu de le déclarer recevable ; Au fond
Considérant que le requérant sollicite de la Haute juridiction de dire que le Ministre de l’Economie et des Finances, en demandant, d’une part, au président de la Cena de solliciter le Ministre du Travail et de la Fonction Publique pour le recrutement des opérateurs de saisie devant servir à la Cena et en imposant, d’autre part, le paiement des primes et indemnités aux membres des démembrements de la Cena par les receveurs-percepteurs, a violé la loi électorale n° 2007-25 du 23 novembre 2007 en son article 35 alinéa 2, le contenu du règlement financier de la Cena, objet du décret n° 2007-195 du 20 avril 2007 en articles 21 6 et 13 ; Considérant que Monsieur Jeannot Mathieu Agboton développe que l’administration électorale comprend, outre les membres de la Cena ceux des démembrements de la Cena que sont les Commissions électorales départementales (Ced), les Commissions électorales communales (Cec) et les Commissions électorales d’arrondissement (Cea) dont les personnels exercent leurs activités sous l’autorité et le contrôle de la Cena et sa soumis à un régime disciplinaire régi par le règlement intérieur de la Cena.
Que
le personnel d’appui nécessaire au bon fonctionnement de la mission de la Cena
est constitué notamment ;
des
opérateurs de saisie ; - des agents formateurs ;
des
cadres assistants des membres de la Cena ; Que tout ce personnel est identifié
par le comité technique des ressources humaines, de la formation et de Ii
communication prévu par les dispositions de l’article 39 de la loi n° 2007-25 du
23 novembre 2007 qui en apprécie qualitativement et quantitativement le
recrutement ; Que la Cena dispose d’une réelle autonomie par rapport aux
institutions de la République conformément aux dispositions de l’article 35 de
la loi susvisée Que sur le plan financier, l’institution jouit d’une autonomie
de gestion de son budget, dont les procédures d’exécution sont fixées par le
règlement financier, objet du décret n° 2007-195 du 20 avril 2007 ; Qu’il est
précisé dans ce règlement financier en son article 13 que le président de la
Cena est l’ordonnateur du budget ; qu’iJ est assisté d’un coordonnateur du
budget et d’un régisseur nommé par arrêté du Ministre chargé des finances ;
Que, de plus, les dépenses liées à la rémunération des membres de la Cena, de ses démembrements (Ced, Cec, Cea) ainsi que des agents électoraux sont faites par le Président de la Cena ; Qu’il est inconcevable que le président de la Cena soit ordonnateur d’une partie du budget de l’Institution et qu’une autre partie soit gérée ailleurs ; Que les règlements intérieur et financier de la Cena font partie intégrante de la loi n° 2007-25 du 23 novembre 2007 ; Que vouloir faire exécuter le contenu du règlement financier par le Ministère des finances et une autre partie par la Cena ne créerait qu’un désordre dans la gestion de l’Institution ; que la seule volonté du Ministre des Finances souhaitant voir le paiement des primes et indemnités des démembrements de la Cena se faire par les receveurs percepteurs signifie d’avoir un agent dépendant administrativement d’une structure qui jouit d’une autonomie de gestion et de faire assurer le paiement de ses primes et indemnités par une autre structure n’ayant aucun lien avec l’institution autonome, ce qui semble contraire au contenu de la loi électorale en-vigueur et régissant la Cena ; Qu’en conséquence, le règlement financier de la Cena ne saurait être dissocié du contenu de la loi électorale n° 2007-25 du 23 novembre 2007 et que de ce fait, les recommandations faites par le Ministre de l’Economie et des Finances, d’une part, pour le recrutement des opératrices de saisie et, d’autre part, pour le paiement des primes et indemnités des démembrements de la Cena constituent une violation des - textes de loi régissant l’organe administratif des élections qu’est la Cena ;
Considérant que le Président. de la Cena dans ses observations, fait état de ce que le législateur en créant la Cena l’avait voulue un organe autonome pour gérer les élections de façon indépendante des institutions républicaines pour le bon déroulement des élections à bonne date et dans la transparence afin d’éviter les fraudes qui font naître des contestations aux conséquences imprévisibles ; Qu’il précise que, par ses actes le ministre chargé des finances tente de mettre la Cena à ses ordres au point où elle ne peut rien sans sein autorisation ;
Que des lettres, mises en garde écrites et surtout verbales et autres stratégies telles que la nomination d’un délégué du contrôleur financier particulièrement arrogant et bien d’autres interventions de nature à perturber le bon déroulement des élections ont aujourd’hui cours ; que dès lors la Cena court un grand risque d’être une institution à ordre et une caisse de résonnance des pouvoirs public ; que l’on force -à -ce n que -les agents de la Cena relèvent du Ministère en charge des finances ;
Qu’il indique que les régisseurs de la Cena étaient là pour gérer les fonds de la Cena en respectant des décisions de la Cena mais qu’aujourd’hui ils reçoivent directement les ordres du Ministre de l’Economie et des Finances ; que la Cena ne peut pas décider aujourd’hui d’appliquer son budget, bien que ce soit approuvé par le Ministre de l’Economie et des finances ; que· dernier décide que ce soient ses agents qui aillent payer l, nombreux agents de la Cena sur le terrain ; même dans les coins les plus reculés, ce qui occasionne des retards, source de tensions que certains responsables de ce Ministère tentent de monter les autres membres de la Cena contre le Président et coordonnateur au budget chargé de matériels en refusant d payer certaines primes pourtant prévues dans le budget ; que dans ces conditions, l’autonomie de la Cena est vraiment menacée à tout point de vue alors que la loi n° 2007-25 du 2 novembre 2007 portant règles générales pour les élections en République du Bénin précise en son article 35 que la Cena « jouit d’une autonomie de gestion de son budget ... » ; qu’aujourd’hui ce budget est géré par les agents du Ministère de l’Economie et des Finances ; que la résistance des responsables de la Cena face aux assauts répétés du Ministre a conduit les membres du bureau de la Cena a être reçus par le Président de la République à une séance à l’issue de laquelle le gouvernement et la Cena se sont entendus sur un minimum pour décrisper la situation mais que ce consensus difficilement accepté par les autres membres de la Cena a été encore remis en cause par le même Ministre ; Considérant que le Ministre de· l’Economie et des Finances dans ses observations fait état, d’une part, suite à une mission de vérification de la gestion de la Cena 2007, de certaines irrégularités constatées quant au mode de recrutement du personnel d’appui à la Cena, notamment les opérateurs et opératrices de saisie et d’autre part, des dispositions du décret n° 2007-195 du 20 avril 2007 portant règlement financier de la Cena et de son Sap/Cena qui confirment la séparation des fonctions d’ordonnateur et du comptable à laquelle aucune institution de l’Etat ne peut se soustraire ;
Considérant qu’il explique que dans le rapport de la mission de vérification il a été recommandé que « le personnel d’appui, notamment les opératrices de saisie devant servir temporairement à la Cena soit recruté et mis à la disposition de la Cena par le Ministre du Travail et de la Fonction Publique » ; mais que malgré cette recommandation, il propose que le personnel d’appui soit recruté non pas par le Ministère du Travail et de la Fonction Publique mais sous sa supervision pour garantir d’une part, l’autonomie de la Cena, et d’autre part, un minimum de compétence dont l’institution a besoin ... Que par lettre n° 372-C/ Mef/Dc/Igf du 07 février 2008, il a saisi le président de la Cena d’un exemplaire du rapport de vérification en lui demandant de tenir compte des recommandations formulées pour corriger les irrégularités relevées ; Qu’à aucun moment le Ministre de l’Economie et des Finances n’a exigé de la Cena de faire recruter le personnel d’appui encore moins les opératrices de saisie par le Ministre du Travail et de la Foncction Publique ; Qu’il n’y a pas, par conséquent, violation du contenu de la loi électorale en son article 35 alinéa 2, encore moins celle du contenu du règlement intérieur de la Cena 2008 ;
Considérant que le Ministre de l’Economie et des Finances explique par ailleurs qu’en application des dispositions du décret n° 2007-195 du 20 avril 2007 portant règlement financier de la Cena et de son Sap /Cena, il a nommé auprès de la Cena un régisseur pour s’occuper exclusivement de la phase dl’ paiement et du maniement des deniers publics (Cf. article 13) ; Mais qu’étant à demeure à Cotonou, le même régisseur ne. peut parcourir les départements du pays pour effectuer les paiements aux agents électoraux, et qu’il a proposé que les recettes perceptions soient mises à contribution pour opérer des paiements pour le compte du régisseur, démarche qui n’a pas recueilli l’accord de certains membres de la Cena qui ont tôt fait d’affirmer que c’est une volonté de bloquer le processus électoral et d’arracher à la Cena son autonomie de gestion ; Qu’à la suite de deux séances de travail tenues avec les membres de la Cena dont l’une présidée par le Chef de l’Etat, il a été admis qu’il faut nécessairement appliquer les dispositions du règlement financier et qu’en la matière, il revient au Ministre de l’Economie et des Finances d’adjoindre au régisseur, des assistants régisseurs qui devront sillonner tous les départements pour procéder au paiement des dépenses électorales ;
Que, dans ce cadre, par lettre n° 2008/677/C/Mef/Sp du 06 mars 2008, il a mis à la disposition du Président de la Cena, vingt-six (26) assistants régisseurs conformément au besoin qu’il a lui-même exprimé à la suite de la séance présidée par le Chef de l’Etat ; Que ces assistants régisseurs, agents du Ministère charge des Finances, ont qualité pour manier les deniers publics sous la seule responsabilité du régisseur, ce qui garantit sécurité des fonds mis à la disposition de la Cena ; Que dans ces conditions, l’on ne saurait dire qu’il désigné des receveurs percepteurs pour payer des primes indemnités aux membres des démembrements de la Cena ; Qu’il n’y a pas violation de la loi n° 2007-25 du novembre 2007, ni du règlement intérieur de la Cena et encore moins du règlement financier de la Cena, objet du décret 2007-195 du 20 avril 2007 en ses articles 2, 6 et 13 ;
Sur le recrutement du personnel d’appui Considérant que l’article 35 alinéa 2 de la loi n° 2007-2 ; du 23 novembre 2007 dispose ; « La Commission électorale nationale autonome (Cena) dispose d’une réelle autonomie par rapport aux institutions de la République (Exécutif, Assemblée nationale, Haute cour de Justice, Conseil économique et Social Haute autorité de l’Audiovisuel et de la Communication), sous réserve des dispositions des articles 49, 81 alinéa2 et 1171er et 2 tirets de la Constitution du 11 décembre 1990 et des articles 42, 52 et 54 de la loi n° 91-009 du 04 mars 1991 portant loi organique sur la Cour constitutionnelle modifiée par la loi du 31 mai 2001 » ;
Considérant que l’article 39 de la loi n° 2007-25 du 23 novembre 2007 dispose :
« La Commission électorale nationale autonome (Cena) s’appuie sur trois (03)
comités techniques :
Comité
des ressources humaines de la formation et de la communication, présidé par le
secrétaire à la communication et aux relations extérieures de la Commission
électorale nationale autonome (Cena) ;
Considérant le règlement intérieur de la Cena 2008 adopté le 22 janvier 2008
dispose en son article 21 : « Le Comité des ressources humaines de la formation
et de la communication, présidé par le secrétaire à la Communication et aux
relations extérieures, comprend deux sous-comités :
Sous-comité
Ressources humaines ; Le sous-comité ressources humaines examine toutes les
questions relatives au recrutement du personnel de soutien nécessaire à
l’accomplissement de la mission de la Cena ; Le sous-comité formation ;
Considérant qu’à l’appui de ses observations, le président de la Cena a produit
la lettre n° 2008/371-C/Mef/Dc/Igf du 07 février 2008 portant en objet
« Dispositions en vue des prochaines élections communales » à lui adressée par
le Ministre de l’Economie et des Finances ; Qu’il ressort de cette lettre ce qui
suit « En vous transmettant une copie du rapport provisoire de la Commission et
afin de pallier. Ces manquements et d’éviter que les mêmes errements ne se
reproduisent, j’ai l’honneur de vous demander de tenir compte des
recommandations qui y sont formulées et dont l’essentiel se présente comme
suit :
solliciter
le Ministre de la Fonction Publique et du Travail pour le recrutement du
personnel d’appui notamment les opératrices de saisie devant servir
temporairement à la Cena ;
Considérant que, quant au Ministre de l’Economie et des Finances, il a produit, à l’appui de ses observations, sa lettre N° 2008/372-C/Mef/Dc/Igf du 07 février 2008 portant en objet « dispositions en vue des prochaines élections communales » adressée au secrétaire administratif permanent de la Cena (Sap/Cena) ;
Considérant que cette lettre n° 2008/372-C du 07 février 2008 adressée non pas au Président de la Cena mais plutôt au secrétaire administratif permanent de la Cena ne fait nullement cas du recrutement du personnel d’appui mais plutôt des dispositions à prendre par le secrétaire administratif permanent en ce qui concerne le matériel électoral, la comptabilité-matière et l’utilisation des véhicules au niveau du secrétariat administratif permanent de la Cena ; Considérant que c’est plutôt la lettre n° 2008/371-C du 07 février 2008 que le Ministre de l’Economie et des Finances a omis de produire qui est celle adressée au Président de la Cena ;
Que c’est cette lettre-ci qui en sa page 2 invite le président de la Cena à « -solliciter le Ministre de la Fonction Publique et dl Travail pour le recrutement du personnel d’appui notamment le opératrices de saisie devant servir temporairement à la Cena » ; Que c’est difficilement que le Ministre de l’Economie e des finances pourra soutenir qu’il n’a pas demandé au président de la Cena de faire recruter le personnel d’appui notamment les opératrices de saisie par le Ministre de la Fonction Publique et dl Travail, contrairement à son affirmation contenue à la page 2 de ses observations et ainsi conçue : « Dans ce rapport, il a été recommandé que « le personnel d’appui, notamment les opératrices de saisie devant servir temporairement à la Cena soit recruté et mis à la disposition de la Cena par le Ministre de la Fonction Publique et du Travail » ;
Malgré cette recommandation, j’ai plutôt proposé que le persoill1el d’appui, notamment les opérateurs et opératrices de saisie, soit recruté non pas par le Ministère de la fonction Publique mais sous sa supervision, pour garantir d’une part, l’autonomie d, la Cena, et d’autre part, un minimum de compétence don l’institution a besoin. Ainsi dès la mise en place de la Cena 2008, j’ai par la lettre n° 372-C/Mef/Dc/Igf du 07 février 2008, saisi le Président de la Cena, à l’effet de lui transmettre un exemplaire du rapport de vérification cité supra et lui demander de bien vouloir prendre en compte les recommandations formulées pour corriger le irrégularités relevées ; A aucun moment, le Ministère de l’Economie et de : finances n’a exigé de la Cena, de faire recruter le personne d’appui encore moins les opératrices de saisie, par le Ministère d, la Fonction Publique » ; Considérant que les dispositions de l’article 21 du règlement intérieur de la Cena attribue au sous-comit ressources humaines l’examen de « Toutes les questions relative au recrutement du personnel de soutien nécessaire l’accomplissement de la mission de la Cena » ; Qu’il appartient, dès lors, à ce sous comité de prendre toutes les dispositions idoines à cet effet, en recourant soit au ministère de la fonction publique et du travail, soit à toute autre structure dont les compétences sont prouvées en la matière ; Que le Ministre de l’Economie et des Finances ne pouvait exiger de lui de faire recruter le personnel d’appui encore moins les opératrices de saisie par le Ministère du Travail et de la Fonction Publique ; Que la demande du Ministre de l’Economie et des Finances contenue dans sa lettre n° 371-C/Mef/Dc/Igf du 07 février 2008 tendant à inviter le Président de la » Cena à « solliciter le Ministre de la Fonction Publique et du Travail pour le recrutement du personnel d’appui notamment les opératrices de saisie devant servir temporairement à la Cena » constituerait une immixtion dans l’administration de la Cena, donc une violation du principe de son autonomie de gestion, si le Ministre de l’Economie et des Finances devait obliger le président de la Cena à le suivre ;
Qu’il l’a si bien compris qu’il s’est limité aux intentions sans pouvoir aller aux actes au point où, dans ses observations n° 2008/781-C/Mef/Sp du 14 mars 2008 adressées à la cour, il s’est rétracté en affirmant que « j’ai plutôt proposé que le personnel d’appui, notamment les opérateurs et opératrices de saisie, soit recruté non pas par le Ministère de la Fonction Publique, mais sous sa supervision, pour garantir d’une part, l’autonomie de la Cena, et d’autre part, un minimum de compétence dont l’institution a besoin » ;
Qu’il y a lieu de dire que le Ministre de l’Economie et des Finances, en demandant au Président de la Cena, sans le lui imposer, de solliciter le Ministre de la fonction Publique et du Travail pour le recrutement des opératrices de saisie devant servir à la Cena, ne viole pas le principe de l’autonomie de gestion de la Cena ; Sur le paiement des primes et indemnités aux membres des démembrements de la Cena par les receveurs percepteurs Considérant que l’article 35 de la loi n° 2007-25 du 23 novembre 2007 dispose :
« Les élections sont gérées par un organe administratif dénommé Commission électorale nationale autonome (Cena). La Commission électorale nationale autonome (Cena) dispose d’une réelle autonomie par rapport aux institutions de 10 République (Exécutif, Assemblée nationale, Cour constitutionnelle, Cour Suprême, Haute cour de Justice, Conseil Economique et social, Haute Autorité de l’Audiovisuel et de lé Communication), sous réserve des dispositions des articles 49, 81 alinéa 2 et 117 1er et 2è tirets de la constitution du 11 décembre 1990 et des articles 42, 52 et 54 de la loi n° 91-009 du 04 mars 1991 : portant loi organique sur la Cour constitutionnelle modifiée par la loi du 31 mai 2001 Elle jouit d’une autonomie de gestion de son budget initialement intégré au budget général de l’Etat par le soin dl secrétariat administratif permanent de la Commission électorale nationale autonome (Sap/Cena) conformément aux dispositions des articles 46, 105 et 112 de la présente loi ; Le gouvernement fixe par décret, le règlement financier de la Commission électorale nationale autonome (Cena) et de son secrétariat administratif permanent » ; Considérant que le règlement financier concerné fait l’objet du décret n° 2007-195 du 20 avri12007 ;
Que ce règlement financier dispose en ses articles 2, 6 et 13 : Article 2 : La Cena est l’organe administratif chargé de la gestion des élections. A ce titre, elle s’occupe de la préparation, de l’organisation, du déroulement, de la supervision des opérations de vote et de la centralisation des résultats.
Elle jouit d’une autonomie de gestion de son budget. Article 6 : Les dépenses de la Cena comprennent les dépenses liées à la préparation, à l’organisation, au déroulement, à la supervision des opérations de vote ainsi qu’à la centralisation des résultats. Elle jouit d’une autonomie de gestion de son budget. Dépenses liées à la rémunération des membres du personnel de la Cena y compris celle des préposés de vote ; Dépenses liées à l’acquisition du matériel électoral • Autres dépenses de fonctionnement ; • Dépenses liées à l’équipement de la Cena. Article 13 : Le président de la Commission électorale nationale autonome (Cena) est l’ordonnateur du budget de la Cena. Il est assisté du Coordonnateur du budget de la Cena ct d’un régisseur nommé par arrêté du Ministre chargé des Finances Le président de la Cena peut déléguer ses pouvoirs au coordonnateur du budget.
Le cas échéant, cette délégation ne peut concerner ’lue le ; dépenses de rémunération du personnel et les dépenses courantes. » Considérant que dans ses observations, le ministre de l’Economie et des Finances indique que le régisseur par lui nommé étant à demeure à Cotonou, il ne peut parcourir tous les départements du pays pour effectuer les paiements aux agents électoraux qui s’y trouvent ; Qu’il a « proposé que les recettes perceptions soient mises à contribution pour opérer des paiements pour le compte du régisseur », ce qui « n’a pas recueilli l’accord de certains membres de la Cena qui ont tôt fait d’affirmer que c’est une volonté de bloquer le processus électoral et d’arracher à la Cena son autonomie de gestion » ; qu’à la suite de deux importantes séances de travail tenues avec les membres de la Cena, « il a été admis qu’il faut nécessairement appliquer les dispositions du règlement financier et qu’en la matière, il revient au Ministre de l’Economie et des Finances d’adjoindre au régisseur des assistants régisseurs qui devront sillonner tous les départements pour procéder au paiement des dépenses électorales », et que dans ce cadre il a « mis à la disposition du Président de la Cena, vingt-six (26) assistants régisseurs, conformément au besoin qu’il il lui-même exprimé à la suite de la séance de travail présidée par le Chef de l’Etat » ;
Considérant que le Président de la Cena dans ses observations indique que face aux actes du ministres en charge des finances tels que « lettre, mises en garde en garde écrites et surtout verbales, intimidations et autres menaces couplées de beaucoup de stratégies pour vexer les membres de la Cena telles que la nomination d’un délégué du contrôleur financier particulièrement arrogant ... la Cena court un grand risque d’être une institution à ordre et une caisse de résonnance des pouvoirs publics » ;
Qu’ « aujourd’hui, on force-.à ce que les agents de la Cena relèvent du Ministère en charge des finances » ; Que « les régisseurs de la Cena étaient là pour gérer les fonds de la Cena en respectant les décisions de la Cena », mais qu’ « aujourd’hui, ils reçoivent directement les ordres du Ministère de l’Economie et des Finances » ; Que « la Cena ne peut pas décider aujourd’hui d’appliquer son budget, bien que ce soit approuvé par le Mef » ;
Que « ce dernier décide que ce soient ses agents qt aillent payer les nombreux agents sur le terrain, même dans le coins les plus reculés, ce qui occasionne des retards, sources d tension » ; Que « certains responsables de ce ministère tentent dl monter les autres membres de la Cena contre le Président et 11 Coordonnateur au budget chargé de matériels en refusant dl payer certaines primes pourtant prévues dans le budget » ;
Considérant qu’aux termes des dispositions de l’alinéa de l’article 35 de la loi 2007-25 du 23 novembre 2007 portant règle générales pour les élections en République du Bénin, la Cena, jouit d’une autonomie de gestion de son budget ; Qu’aux termes des dispositions de l’alinéa 2 de cet article de la même loi, la Commission électorale nationale autonome (Cena) dispose d’une réelle autonomie par rapport au institutions de la République (Exécutif, ..... ) ;
Considérant que l’application des dispositions d règlement financier, objet du décret n° 2007-195 du 20 avril 200 ne saurait enlever à la Cena cette autonomie de gestion affirmé par la loi n° 2007-25 du 23 novembre 2007 en son article 35 et réaffirmée dans le règlement financier en son article 2 alinéa 2 ;
Considérant que la proposition du Ministre de l’Economie et des Finances de mettre à contribution les recettes perceptions pour opérer le paiement des primes et indemnités aux démembrements de la Cena, tout en les maintenant sous son autorité, sans les détacher et les mettre sous l’autorité d Président de la Cena, viole le principe de l’autonomie de gestion de la Cena ;
Considérant que la nomination du régisseur par le ministre de l’économie et des finances et la mise à disposition du Président de la Cena par lui d’un certain nombre d’assistants régisseurs et d’un délégué du contrôleur financier ne sauraient remettre en cause cette autonomie de gestion en ce sens que ce personnel financier mis à sa disposition relève, dès lors, de son autorité, doit recevoir les ordres de la Cena et exécutées les décisions de la Cena pendant la durée de sa mission à la Cena, dans le respect des dispositions des lois électorales, du règlement intérieur et du règlement financier de la Cena ; Que le ministre de l’économie et des finances en mettant à la disposition du Président de la Cena un personnel financier qu’il maintient sous ses ordres viole le principe de l’autonomie de gestion de la Cena affirmée par la loi électorale n° 2007-25 du 23 novembre 2007, le règlement intérieur et le règlement financier ; Par ces motifs,
Décide :
Article 1er : Le recours en date à Cotonou du 04 mars 2008 de Monsieur Jeannot Mathieu N. Agboton contre la violation de l’autonomie de la Commission électorale nationale autonome (Cena) par le Ministre de l’Economie et des Finances est recevable ;
Article 2 : En demandant au Président de la Cena sans le lui imposer, respect de l’autonomie de gestion de la Cena obligeant, de solliciter le Ministre de la Fonction Publique et du Travail pour le recrutement des opératrices de saisie devant servir à la Cena, le Ministre de l’Economie et des finances ne viole pas la loi électorale n° 2007-25 du 23 novembre 2007 en son article 35 alinéa 2 ;
Article 3 : Le Ministre de l’Economie et des Finances, en maintenant sous ses ordres le personnel financier qu’il a mis à la disposition du président de la Cena viole le principe de l’autonomie de gestion de la Cena Article 4 : Notification du présent arrêt sera faite aux parties et au Procureur général près la Cour suprême. Ainsi fait et délibéré par la Cour suprême composée de :
Grégoire Alayé Président de la chambre administrative, Cyprien F. Boko et Victor D. Adossou présidents conseillers Et prononcé à l’audience publique du lundi cinq mé deux mille huit, la Cour étant composée comme il est dit ci-desst1 en présence de : René Louis Kèkè, Ministère public et de Maître Irène Olga Aïtchedji, greffier.
Et ont signé
Le Président,
Le rapporteur,
Grégoire Alayé
Cyprien F. Boko
Le greffier, Irène O. Aïtchedti
Suivent les signatures
Pour expédition certifiée conforme Cotonou, le 14 mai 2008
Le Greffier en chef,
FrançoiseTchibozo-Quenum
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