"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

Après l’élection du bureau de la Cena sans la mouvance :

 L’opposition gagne des points


Écrit par Le Matinal du 24/01/2008   

La minorité parlementaire a, dans la nuit du mardi 22 au mercredi 23 janvier, réussi à s’entourer des garanties suffisantes pour mettre en place le bureau de la Commission électorale nationale autonome (Cena). En dehors des autres séries de rebondissements qui pourraient suivre, c’est la majorité qui vient simplement de changer de camp.

Un bureau de la Commission électorale nationale autonome (Cena) entièrement désigné vers 04 heures hier matin par l’opposition qui, à l’issue d’âpres tractations et d’intrigues, s’est donnée une majorité de 10 sur les 17 membres qui composent la Cena 2008. Après que les 07 représentants du gouvernement ont fait l’option de la politique de la chaise vide, ils doivent désormais subir les conséquences de leur mauvais choix. A vrai dire, c’est parce que le camp gouvernemental a compris qu’il n’avait plus la situation en main que des consignes ont été données pour que les 07 sénateurs quittent la salle. En se repliant à leur quartier général sis à la Chambre de Commerce et d’Industrie et du Bénin (Ccib), les éléments de la mouvance s’étaient simplement pris à leur propre piège. Ils pensaient jouer sur le temps, revoir leur stratégie pour enfin se trouver d’autres partenaires en vue de retourner la situation à leur profit. Surtout que les discussions se poursuivaient toujours jusqu’en ce moment avec le groupe des 13 députés de l’honorable Issa Salifou. Mais c’était bien tard. La majorité a déjà changé de camp. En effet, les parties prenantes qui se sont assurées de garanties suffisantes ont profité des frustrations nées du non respect de certains engagements et des mécontentements qui s’en sont suivis pour avoir raison de cette mouvance. En dehors du groupe des 13 députés, plusieurs autres grands mouvanciers avaient déjà changé d’avis et attendaient le moment propice pour agir. Et les contradictions, les intrigues comme les pressions faites sur certains lors du choix des représentants de la majorité parlementaire à la Cena sont encore vivaces dans les esprits. Dans ces conditions où nombre d’entre les acteurs politiques de la mouvance ont commencé par perdre du terrain alors qu’ils ont pratiquement tous des dossiers sales aux dos et étaient obligés jusque là d’être très prudents, de garder le silence au point d’avaler au quotidien les couleuvres, le soutien de l’opposition pour l’aider à grandir était devenu, de tous les points de vue, la seule alternative. Et au moment où le ballet diplomatique et les autres rappels à l’ordre se poursuivaient entre les ténors de la mouvance à la Ccib , l’opposition a vite pris ses responsabilités et a élu un bureau.

La configuration politique en question

  La configuration politique de la Cena semble largement respectée quand on observe bien les membres qui composent ce bureau. La Société civile a été prise en compte dans ce bureau à travers son président, le syndicaliste Pascal Todjinou. La majorité présidentielle est représentée à travers l’ex-ministre de la famille du Général Mathieu Kérékou, Mme Léa Hounkpè. A ce niveau même, il faut ajouter que l’opposition qui a réussi à piéger la mouvance aura été stratégique. La seule présence de Léa Hounkpè a permis de régler facilement deux situations majeures. Outre son statut d’élément de la mouvance, le Secrétariat administratif permanent de la Cena (Sap/Cena) a retrouvé sa place dans ce bureau fortement miné par l’opposition qui a habilement laissé un poste vacant à la mouvance après avoir pourvu les autres qui sont stratégiques pour elle.

La Cour Suprême piégée

  A la lecture des stratégies développées pour la mise sur pied de ce bureau, on remarque que c’est le même schéma que la mouvance parlementaire a utilisé lors de la désignation des représentants de l’Assemblée nationale à la Cena et l’opposition s’est retrouvée le dos au mur. Les députés des partis politiques de l’opposition mis en minorité et soucieux de leur avenir politique avaient vidé l’hémicycle. Les autres forts, de leur nombre et sous pression, ont simplement poursuivi les travaux comme si de rien n’était tout en prenant soin de laisser à l’opposition le nombre de sièges qui lui revenait compte tenu de la clé de répartition votée en son absence. Malgré les jérémiades et les différents recours en inconstitutionnalité contre la procédure, la Cour Suprême a validé la clé de répartition contestée et a obligé l’opposition à vite reprendre sa place dans l’hémicycle pour procéder dans un délai de quatre jours à la désignation de ses représentants à la Cena. Dans ces conditions où les protagonistes ont agi de la même façon, il sera difficile pour la Cour Suprême de ne pas reconnaître ce bureau. Surtout que c’est le jeu de la majorité reconnu par le principe démocratique qui a une fois encore prévalu.  

Les raisons de la crise

  Le président Yayi Boni a été élu à 75% dont 40 sont issus des partis politiques qui ne se sont pas retrouvés dans le projet de société de son challenger Me Adrien Houngbédji arrivé en deuxième position. Mais très tôt, le président Yayi Boni a commencé par prendre ses distances vis-à-vis de ces partenaires. Et de la façon la plus radicale. C’est le richissime homme d’affaires Séfou Fagbohoun, président du Mouvement Africain pour la Démocratie et le Progrès (Madep) qui a commencé par en faire les frais. D’autres grands opérateurs économiques suivront et on dit que certains conseillers et autres courtisans du Palais de Cotonou préconisent ces comportements. Or, c’est sur ces forces qu’il a besoin de compter pour asseoir ses bases. Dans la foulée, le président de la République a commencé par charcuter dans ses propres 35%. On peut citer les cas Célestine Adjanohoun et Luc da Matha Sant’Anna mais aussi et surtout celui Marcelin Zannou ou de certains grands députés élus dans le septentrion dont on ne connaît pas encore les conséquences pour la suite. Et en moins de deux ans le nombre de mécontents s’est accru dans cette mouvance hétéroclite. Sans compter la fronde sociale qui risque de paralyser bientôt tout le pays si rien n’était fait dans l’immédiat. Il fallait simplement bien lire le mémorandum du groupe des 13 députés pour deviner ce que sera le pays.

 Jean-Christophe Houngbo



24/01/2008
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