Climat politique nationale
De
la crise aux solutions d’apaisement d’Albert Tévoèdjrè
La
crispation des relations entre les acteurs politiques du Bénin a franchi le
rubicond depuis le 12 mars 2008. Les opposants au régime en place et les
chantres du changement se sont lancés dans une guerre de dénigrement
réciproque. Albert Tévoèdjrè, médiateur de la présidence de
Vingt
mois après l’accession du Dr Boni Yayi au pourvoir, les grandes formations
politiques de l’échiquier national prennent déjà leur distance vis-à-vis du
Gouvernement du changement. De ce fait, la situation politique béninoise
actuelle devient délétère. Certes, l’opposition radicale et rétive ne s’est pas
encore déclarée. Mais la position des députés du G13 (une alliance de sept
partis politiques représentés à l’Assemblée nationale), et la déclaration du
quarto constitué de Nicéphore Soglo de
Tévoèdjrè
face aux protagonistes de la crise
Face à
une telle situation préjudiciable à la paix et à la concorde nationale, le
professeur Albert Tévoèdjrè a mis en branle ses bons offices, conformément à
l’article 3 du décret portant sa nomination à la tête de l’organe de médiation
de
C’est
alors que, le professeur Tévoèdjrè, médiateur de
Des
points d’achoppement évidents
Ce
n’est un secret pour personne et point n’est besoin de le démontrer. Les
nouvelles méthodes de gouvernance, que Boni Yayi, dans sa vision de changement,
a instauré dans le pays depuis avril 2006 bousculent des intérêts. Même ceux
qui affirment leur adhésion à sa vision de changement ne sont pas épargnés de
son combat sans merci contre la corruption. La rigueur, l’équité, l’obligation
de résultats et de compte rendu et le respect de l’autorité dont il fait son
principe de gestion des affaires d’Etat met mal à l’aise bien de ses proches du
pouvoir exécutif que législatif. Les bouleversements intervenus à l’Assemblée
nationale n’y sont pas étrangers. Par ailleurs, le retournement brusque du
président Soglo contre le chef de l’Etat trouve ses origines dans la bataille
autour de la mairie de Cotonou et l’obstination du gouvernement à maintenir le
marché Dantokpa dans le giron de l’Etat. De même, l’offensive politique du chef
de l’Etat et des membres de son gouvernement, omniprésents sur le terrain au
contact des populations, inquiète les aspirants au pouvoir aussi bien local que
suprême du pays. Voilà l’essentiel des problèmes sur lesquels le médiateur devra
amener les différents protagonistes de la tension politique actuelle à trouver
un consensus. A moins de se tromper d’analyse, la tâche ne parait pas facile.
Car, Nicéphore Soglo aura du mal à renouer les amarres avec Boni Yayi sans que
ce dernier ne lui laisse au préalable
Et
si Houngbédji refusait la main tendue ?
Jeudi
dernier, alors que les observateurs des faits politiques du pays cherchaient à
avoir les échos de la rencontre du médiateur avec le président Houngbédji
annoncée à grand renfort médiatique, c’est plutôt à la rencontre entre le
président de l’Assemblée nationale, le professeur Mathurin Nago et le médiateur
Tévoédjrè qu’ils ont eu droit. Houngbédji n’avait pas répondu au rendez-vous.
Le vendredi, le médiateur devrait adresser un rapport au chef de l’Etat, sur
les résultats de sa mission, quitte à faire un rapport complémentaire dès que
Houngbédji aurait répondu à son appel. Pendant ce temps, les informations
étaient divergentes sur les raisons de la rencontre manquée entre Houngbédji et
Tévoèdjrè. Pour certains, le président du Prd, qui a depuis avril 2006, gardé
ses distances vis-à-vis du gouvernement du changement, sans pour autant
déclarer son opposition au régime, aurait purement et simplement rejeté
l’invitation du médiateur Tévoèdjrè. Pour d’autres, la non tenue de la
rencontre serait due à un problème de disponibilité. Le président Houngbédji
aurait évoqué juste une perturbation dans son calendrier pour demander un
report de la rencontre. Mais, seulement, ils n’ont pas précisé la date à
laquelle cette rencontre est reportée. Personne à ce jour n’a pu dire avec
exactitude ce qui explique le report de la rencontre.
Qu’attend
Moïse Mensah pour entrer dans la dynamique de la gouvernance concertée ?
Moïse
Mensah est très attendu dans l’apaisement de la tension politique nationale.
L’homme en qui le chef de l’Etat Boni Yayi a placé sa confiance en le nommant à
la tête du Haut commissariat de la gouvernance concertée tarde à entrer dans
les prérogatives que lui confère son poste. Sinon, comment comprendre que sa
structure ne prenne pas part aux médiations relatives à la situation politique
actuelle prise à bras le corps par Albert Tévoèdjrè ? Depuis le 19 février
2008, date à laquelle elle est installée, le Haut commissariat de la
gouvernance concertée contrairement au dynamisme affiché par Albert Tévoèdjrè
dès sa nomination ne s’est manifesté sur aucun terrain de la gouvernance
concertée. Le renard de Djrègbé n’a pas attendu de disposer de locaux pour
abriter sa structure encore moins d’avoir en main tous ses collaborateurs avant
de se mettre au travail. Même si chacun à sa méthode de travail, celle de Moïse
Mensah commence sérieusement par inquiéter. L’ex ministre des finances du
général Mathieu Kérékou a la lourde mission de montrer que sa structure à un
rôle prépondérant dans le maintien d’un climat de paix au Bénin. Il semble
rater le premier coche. Certainement qu’il aura des opportunités de se rattraper.
Car, c’est à cette seule condition que Moïse Mensah donnera raison au chef de
l’Etat de l’avoir placé à la tête d’une structure aussi importante pour
l’apaisement du climat politique.
Que
peut-on espérer de la médiation de Albert Tévoèdjrè ?
Au
Bénin, tout part des intérêts partisans et tout se ramène à cela surtout quand
il s’agit de l’animation de la vie politique. Les divergences qui s’observent
ces derniers temps dans la classe politique nationale ne sont pas étrangères à
cette façon de gérer la citée au Bénin en particulier et sous le soleil des
tropiques en général. Alors, prétendre mettre un terme à l’ambiance délétère de
pré campagne électorale, c’est pouvoir satisfaire non seulement aux
revendications contenues dans la déclaration du 12 mars dernier mais également
arriver à faire converger les intérêts des uns et des autres dans la même
direction. Dans ce contexte, la mission que s’est assignée Albert Tévoèdjrè à
savoir : amener les protagonistes de la crise politique béninoise de ces
derniers jours à fumer le calumet de la paix est-il faisable ? Rien n’est
sûr. Quand on sait que le rôle du médiateur de la république, Albert Tévoèdjrè
dans le dénouement de la situation ne consiste qu’à écouter les protagonistes,
produire un rapport, donner des conseils et amener les protagonistes à
s’entendre, le scepticisme de certains observateurs peut aisément se
comprendre. « Le chien qui n’est pas rassasié ne s’amuse pas avec son
second qui l’est » dit un adage. D’autres diront que le renard de Djrègbé
s’est simplement mis la corde au cou. Mais fort heureusement, avec les
politiciens, il faut s’attendre à tout. Ce qui est certain, le plus long voyage
commence toujours par le premier pas. Le plus grand mérite de Albert Tévoèdjrè
c’est d’abord d’avoir osé. Espérer qu’il réussira à amener les contradicteurs
du changement à taire tout de suite leurs différentes ambitions, c’est une
autre affaire. En toute objectivité, quelle concession peut faire
Angelo DOSSOUMOU, Ignace AOUBRE, 3
avril 2008
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