Désignation avant délai des membres de la Cour constitutionnelle :
Mathurin Nago désobéit à Yayi Boni
27 février 2008-In Matinal
Le président de l’Assemblée nationale n’a plus désigné
hier mardi 26 février les représentants du parlement à la Cour constitutionnelle contrairement
aux recommandations du chef de l’Etat. Selon certaines sources parlementaires,
ce sont les pressions des autres députés, toutes tendances confondues qui ont
obligé Mathurin Nago à désobéir cette fois-ci au président de la République.
Le processus de la désignation des quatre représentants de
l’Assemblée nationale à la Cour
constitutionnelle quatre mois avant la fin du mandat de actuelle Cour tel que
voulu et exigé par le chef de l’Etat au président Mathurin Nago a été avorté
hier au Palais des Gouverneurs à Porto-Novo. Après moult tractations, des
recours sans cesse au Règlement Intérieur de l’Assemblée nationale, la loi
fondamentale et des conseils à plusieurs juristes du pays qui auraient
simplement montré que le bureau de Mathurin Nago a peu de chance pour faire
valider sans anicroche une désignation opérée dans les conditions exigées par
le président Yayi Boni. Et après plusieurs heures de concertations avec les
siens et quelques députés de l’opposition, le président Mathurin Nago a dû faire
en catastrophe un bref saut à la présidence de la République pour
expliquer au chef de l’Etat la délicatesse de la situation. Mais avant, il
était en réunion avec ses collègues du bureau. La concertation a duré plus
d’une heure 30 minutes et les autres députés abandonnés à eux-mêmes, ont passé
leur temps à spéculer sur le sujet. Le dossier en question La
requête du chef de l’Etat qui oblige le bureau de l’Assemblée nationale à
désigner un peu plus tôt ses représentants à la Cour constitutionnelle date en fait d’une
semaine. C’est le Garde des Sceaux, ministre de la Justice qui, sous escorte,
a introduit le dossier au cabinet de Mathurin Nago il y a donc un e semaine.
Tous les noms des quatre personnes que le bureau devrait aider à envoyer siéger
à la haute juridiction avaient accompagné, dit-on à l’Assemblée nationale la
lettre du chef de l’Etat sur le sujet. Le président Yayi Boni qui serait
conscient de la situation critique qui prévaut depuis quelques semaines au sein
de sa mouvance et le fait que le bureau de l’Assemblée nationale commençait à
être réduit à au plus quatre députés qui lui sont encore fidèles, a décidé de
prendre ses responsabilités pour vite gérer certains dossiers sensibles avant
qu’il ne soit trop tard. D’autres sources parlementaires très crédibles
précisent par ailleurs que c’est parce qu’une certaine peur a commencé par
gagner l’entourage du chef de l’Etat sur l’avenir de la mouvance parlementaire
en panne et qui s’effrite aussi déjà trop que le président Yayi Boni à changé
de fusil d’épaule pour ne pas se retrouver devant le fait accompli. Surtout
avec les dernières prises de positions de certains de ses vieux compagnons qui
commencent par être très critiques vis-à-vis de ses actions à la tête du pays.
Les raisons internes du recul de
Mathurin Nago Face à la situation qui se compliquait de
plus en plus, le président Mathurin Nago aurait décidé enfin d’ouvrir les yeux.
Selon les mêmes sources, c’est dans ce cadre qu’il aurait commencé, après la
levée générale de boucliers et les contestations de certains de ses collègues
dans la nuit du lundi 25 au mardi 26 février dernier, par se soucier une fois
de son destin politique. On apprend même que c’est dans la vague des 35 députés
de la liste Force Cauris pour un Bénin Emergent (Fcbe) qu’il aurait reçu les
meilleurs conseils pour dire cette fois-ci la vérité au chef de l’Etat et lui
montrer les limites de cette entreprise qu’il veut lui faire gérer dans cette
ambiance très polluée. Certains d’entre ces derniers, auraient même dit de vive
voix qu’ils n’allaient pas suivre le président Mathurin Nago si ce dernier
s’obstinait et cherchait à foncer tête baissée. Un troisième groupe de députés
aurait montré que le chef de l’Etat tend, dans ce dossier, à utiliser Mathurin
Nago pour régler ses problèmes avec l’opposition et pourrait par la suite le
lâcher comme cela a été le cas pour d’autres parlementaires entre temps très
préoccupés par l’avenir de la mouvance présidentielle. C’est alors que Mathurin
Nago a commencé par mesurer l’ampleur de la situation. Les mêmes sources
affirment qu’il a pris, aussitôt après, la route de la présidence de la République pour montrer
alors à Yayi Boni les obstacles à la situation qui risque, par ces temps qui
courent, d’être plus préjudiciable à la cohésion dans cette mouvance qui perd
de plus en plus ses marques. A son retour, le président Mathurin Nago réunit la
conférence des présidents. Rien n’a filtré de la rencontre qui a aussi duré
plusieurs minutes. Mais aussitôt après la fin de la rencontre, on apprend que
l’Assemblée nationale ne veut plus désigner avant le délai ses représentants à la Cour Constitutionnelle
comme le souhaite le chef de l’Etat. On dit même que Mathurin Nago qui se
fâchait depuis le lancement du processus serait revenu à de bons sentiments et
serait même plus conciliant et disposé à travailler avec tout le monde dans de
bonnes conditions. Les dessous
juridiques du black out sur le dossier Outre les
questions personnelles, le report du processus de la désignation avant le délai
requis des représentants de l’Assemblée nationale à la Cour constitutionnelle trouve
ses raisons dans des considérations juridiques. Ce sont d’abord
les dispositions de l’article 115 alinéa 3 de la constitution du 11
décembre 1990 qui sont contraires à la logique Yayi Boni de vite connaître les
quatre membres de la haute juridiction pour contourner ses adversaires
politiques. En effet, les membres de la
Cour constitutionnelle sont inamovibles pendant la durée de
leur mandat. Ils ne peuvent être poursuivis ou arrêtés sans autorisation de la Cour constitutionnelle et du
bureau de la Cour Suprême
siégeant en session conjointe, sauf les cas de flagrant délit. Ainsi, les
quatre membres qui se préparaient à être désignés ne pourront jouir de ces
droits qu’après avoir été installés dans leurs fonctions. Ceci dit, il se
pourrait que le même bureau du parlement dont les objectifs politiques seraient
autres avant le 06 juin prochain change d’avis et procède en catastrophe à leur
remplacement. Et la nouvelle décision qui a force de loi et qui annule la
première oblige ces quatre qui seraient désignés à perdre leurs droits acquis.
Ils n’auront pas gain de cause en saisissant les juridictions compétentes. En
plus de cette situation juridique, on dit que les critères de Curriculum vitae,
ceux de la sélection sur la base d’un dossier sérieux n’ont pas été vérifiés
avant le choix des intéressés. Par ailleurs, les juristes approchés dans le
cadre du même dossier ont montré qu’une session extraordinaire est déjà
convoquée pour débattre de la question qui présente d’énormes failles. C’est la
raison pour laquelle, il vaut mieux ne pas insister. Et puis, on dit dans les
couloirs de l’Assemblée nationale que la manière dont le dossier était en train
d’être géré, a suscité trop de tensions qui pourraient être fatales au
président Mathurin Nago qui sera le seul à en faire les frais. Car, plusieurs
parlementaires étaient déjà trop braqués contre lui et étaient prêts à tout
pour lui compliquer la suite. Jean-Christophe Houngbo