28 novembre 2007 - La presse du jour
Le Conseil a bel et bien recommandé à Boni Yayi de saisir Nago
Le
débat sur la levée de l’immunité parlementaire des députés Célestin Adjanohoun
et Luc da Matha Sant’Anna restera toujours d’actualité tant que le gouvernement
du Dr Boni Yayi ne reconnaîtra pas qu’il s’est trompé dans la procédure à
suivre. Et lorsqu’on entend le ministre porte-parole du gouvernement dire des
choses à la télévision nationale pour récuser ce qu’il avait lui-même déclaré
au peuple béninois, il y a alors de quoi s’inquiéter. L’extrait du conseil des
ministres du 9 novembre dernier qui a connu du dossier de malversations à la Sbee rend malheureusement
compte de ce que le Chef de l’Etat avait été bel et bien instruit pour saisir
le président de l’Assemblée Nationale aux fins de la levée de l’immunité
parlementaire des députés cités par le rapport de l’Ige examiné et approuvé par
les membres du gouvernement. Le Chef de l’Etat a-t-il suivi les recommandations
de ce conseil des ministres ? C’est un autre débat qui pourrait être mené.
Ce qui intrigue, c’est qu’on ne sait pas là où veut en venir le ministre
porte-parole du gouvernement qui tente aujourd’hui de faire croire à l’opinion
publique que l’Exécutif ne peut pas tomber dans ces travers constitutionnels.
Les faits sont là et têtus et prouvent que le conseil des ministres a
recommandé la saisine par le Président de la République, Chef de
l’Etat, Chef du Gouvernement, du Président de l’Assemblée Nationale aux fins de
la levée de l’immunité parlementaire nécessaire à la poursuite des intéressés.
C’est écrit noir sur blanc et lu par le ministre porte-parole du gouvernement.
Communiqué
N° 21/PR/SGG/Com/Extra du conseil des ministres du 9 novembre 2007
Le
Conseil des Ministres s’est réuni en séance extraordinaire le vendredi 09
novembre 2007, sous la présidence effective du Président de la République, Chef de
l’Etat, Chef du Gouvernement. Au cours de cette séance, le Conseil des
Ministres a essentiellement examiné et adopté deux dossiers de vérification de
l’Inspection Générale d’Etat. Le premier dossier est relatif aux travaux de la Commission chargée de
vérifier la gestion administrative, financière, matérielle et comptable de la Société Béninoise
d’Energie Electrique sur la période du 1er janvier 2004 au 30 juillet 2007. Du
rapport de la Commission
créée et mise en place à cet effet suite à des dénonciations provenant de la Société, de documents et
de la presse, il ressort que de graves irrégularités, malversations,
prévarications avérées et crimes économiques ont été constatés se
traduisant :
1°- au
plan de la gestion administrative par : * la complaisance, le laxisme,
l’affairisme, le mépris des procédures administratives, de contrôle et d’audit
interne entretenu à dessein par les Directeurs Généraux (Célestine Adjanohoun
et Luc da Matha Sant’Anna) et par les Directeurs de l’Audit Interne et de
Contrôle de Gestion qui se sont succédés à la Sbee du 1er janvier 2004 au 30 juillet
2007 ; * le chevauchement d’attributions entre des structures de la Société ; * les
carences et complicités coupables du Conseil d’Administration caractérisé par
sa composition irrégulière, son mauvais fonctionnement et l’implication
prononcée de son Président (Fatiou Toukourou) dans des transactions
opaques ; * la légèreté et la complaisance avec lesquelles la Cellule Juridique
de la Sbee a
évacué d’importants dossiers, tels le Contentieux Société Bénin Equipements, le
Contentieux SIDELAF et autres ayant entraîné le décaissement de montants
exorbitants par la Sbee
pour le règlement à l’amiable d’affaires pourtant banales au départ ; ce
qui fait douter de leur sincérité au point de s’interroger s’il ne s’agit pas d’une
méthode nouvelle de dilapidation de fonds de la Société ; * le
recrutement pléthorique d’agents sans justification de besoins et/ou sans
qualification et dont le profil n’est pas en adéquation avec le poste
occupé ; * l’absence d’outils et d’instruments indispensables à la gestion
des ressources humaines ; * le clientélisme et le climat malsain ambiant
au sein du personnel.
2°- au
niveau de la gestion financière et comptable de la Sbee : Les vérifications
et contrôles opérés sur pièces et sur place par l’Inspection Générale d’Etat
ont mis en relief : * le versement scandaleux non prévu et sans
autorisation d’une somme de un milliard (1.000.000.000) de francs à un Cabinet
fictif dénommé Société Groupe Leader sous le fallacieux prétexte que ledit Cabinet
a recouvré pour le compte de la
Sbee des créances âgées considérées comme irrécouvrables.
Cette opération osée n’est qu’une duperie dans laquelle les dirigeants de la SBEE de la période de
référence se sont solidarisés pour soutirer l’argent de l’entreprise ; *
la distribution abusive et/ou indue de la prime de bilan à hauteur d’environ
16.050.000 FCFA en moyenne par exercice, à des agents, amis, copains et
parents ; le recours excessif aux emprunts sur le marché financier
ayant entraîné un endettement considérable de quatre vingt (80) Milliards de
FCFA dans le portefeuille de la
SBEE ; * le manque de rigueur dans la gestion de la
trésorerie ; * l’exécution de dépenses non prévues, non éligibles au
budget dont certaines mettent en cause le Cabinet de l’ancien Ministre Kamarou
Fassassi ; * les lacunes graves du système comptable de la Société ; * le retard
prononcé dans la production des états financiers.
3°- au
niveau de la passation des marchés publics ; * les fractionnements abusifs
et fantaisistes des commandes ; * la passation de marchés en violation des
procédures légales et réglementaires ainsi que l’établissement et l’exécution
de contrats irréguliers ayant occasionné des surfacturations et des factures
fictives avec à la clé des détournements et d’importants manques à gagner à
l’Etat béninois. C’est le cas notamment des contrats suivants : * contrat
de marché relatif à l’acquisition des Groupes SIIF (118.400.000 FCFA de manque
à gagner pour l’Etat) ; * contrat de marché relatif à l’achat de dix (10)
tricycles (105.248.680 FCFA de manque à gagner pour l’Etat) ; * contrat de
marché relatif à l’acquisition gré à gré de matériels électriques auprès de la Société Parsian
(873.499.183 FCFA de manque à gagner pour l’Etat) ; * achat de 232 motos
de marque Yamaha et autres dont 155 d’occasion au profit des agents releveurs
de compteurs, qui ont refusé d’utiliser lesdites motos et dénoncé leur prix
exorbitant et leur vétusté à l’achat ; * procédure de financement de
l’acquisition de l’immeuble abritant le siège actuel de la Direction Générale
de la Sbee dont
le coût global a été surévalué et financé à 4.100.000.000 FCFA par recours à un
crédit bancaire Ecobank alors même que les travaux de finition dudit immeuble
ne sont pas encore achevés. On relève par ailleurs dans ce marché un
prépayement sans service fait à ce jour d’une somme de 567.380 0000 FCFA aux
Notaires Yacoub Latoundji et Jean-Jacques Gbedo pour des formalités
d’acquisition dudit siège.
4°- au
niveau de la gestion matérielle de la
SBEE : la gestion matérielle de la SBEE se caractérise
par : * la location fantaisiste tous azimuts d’immeubles jamais occupés
mais payés par la SBEE ;
* l’absence de célérité dans la maintenance des équipements et des matériels
techniques ; * le vol crapuleux et la disparition d’importantes quantités
de matériaux de construction (ciment, fer etc) destinés aux usines de
fabrication de poteaux électriques en béton notamment ; * la commande
d’étrennes pour 213.701.545 FCFA et de boissons pour 28.992.724 FCFA en 2006 au
mépris des règles d’appel à la concurrence etc... Sont responsables de ces
graves irrégularités, malversations, prévarications, détournements, gabegies,
concussions, corruptions et autres faits et actes de mal gouvernance qui ont
contribué à dégrader la situation administrative, comptable et matérielle et
ont ainsi pénalisé les braves populations béninoises, et l’économie nationale
soumises à la crise énergétique sur fond de délestages et de coupures
intempestives, les personnes ci-après : 1°- Madame Célestine Adjanohoun,
ancienne Directrice Générale de la
Sbee ; 2°- Monsieur Luc da Matha Sant’Anna, ancien
Directeur Général Adjoint et ancien Directeur Général de la SBEE ; 3°- Monsieur
Pierre Paulin Sossou, ancien Directeur Comptable et Financier de la Sbee ; 4°- Monsieur
Didier Abel Tela, actuel Directeur Commercial et de la Clientèle de la Sbee ; 5°- Monsieur
Roger Kouessi, ancien Directeur Général de la Sbee ; 6°- Monsieur Innocent da Silva,
Directeur du Patrimoine et de l’Approvisionnement de la Sbee ; 7°- Monsieur Gbènavo,
ancien Directeur de l’Inspection Générale ; 8°- Monsieur Fatiou Toukourou,
Président du Conseil d’Administration de la Sbee ; 9°- Monsieur Mamoud A. Ibikounlé, de la Cellule de Passation des
Marchés Publics de l’ancien Ministère des Mines, de l’Energie et de
l’Hydraulique ; 10°- Monsieur Hyacinthe Kiki, Représentant, la Direction nationale des
Marchés Publics du Ministère des Finances et de l’Economie ; 11°- Monsieur
Bonaventure A. Hounkpè, Représentant la Direction Nationale
des Marchés Publics du Ministère des Finances et de l’Economie ; 12°-
Monsieur Math-urin Ahonoukoun, Responsable hiérarchique des usines à la Direction du Patrimoine
de la Sbee ;
13°- Maître Yacoub Latoundji ; 14°- Maître Jean-Jacques Gbèdo ; 15°-
Monsieur Basile Gbedji, Coordonnateur du Projet d’électrification des localités
rurales financé par la
Banque Africaine de Développement (BAD) ; 16°- Monsieur
Lawal Coles, Magasinier Central Sbee de Cotonou ; 17°- Monsieur Etienne
Coovi Adinsi, agent en service à la Direction du Patrimoine et de l’Approvisionnement
de la SBEE ;
18°- Monsieur Albert Sossou, ex Magasinier à la Direction régionale du
Borgou à Parakou, actuellement admis à la retraite. Face à ce pillage
systématique et organisé des deniers publics, le Conseil des Ministres a
fermement instruit le Ministre des Mines, de l’Energie et de l’Eau, le Garde
des Sceaux, Ministre de la
Justice, de la
Législation et des Droits de l’Homme, le Ministre du Travail
et de la Fonction
Publique, chacun en ce qui le concerne, aux fins de : 1°-
infliger à tous les anciens et actuels responsables, les agents de la Sbee et les fonctionnaires de
l’Etat concernés, des sanctions disciplinaires à la limite de leur
forfaiture ; 2°- mettre en débet les personnes concernées pour les
détournements déguisés et les errements de gestion par elles commis et ayant
entraîné d’importants préjudices financiers à la Sbee ; 3°- mettre en
demeure et faire rembourser les Notaires Yacoub Latoundji et Jean-jacques Gbèdo
les sommes indûment perçues au titre de faux frais d’honoraires ainsi que le
montant de la prétendue Taxe sur Valeur Ajoutée (TVA) relative à la transaction
pour ce qui concerne Maître Jean-Jacques Gbèdo ; 4°- engager, le cas
échéant, des poursuites judiciaires à l’encontre des personnes impliquées dans ce
dossier. S’agissant de Madame Célestine Adjanohoun et de Monsieur Luc da Matha
Sant’Anna actuellement Députés à l’Assemblée Nationale, le Conseil des
Ministres a recommandé la saisine par le Président de la République, Chef de
l’Etat, Chef du Gouvernement, du Président de l’Assemblée Nationale aux fins de
la levée de l’immunité parlementaire nécessaire à la poursuite des intéressés.
En ce qui concerne Monsieur Kamarou FASSASSI, Ministre au moment des faits, le
Conseil des Ministres a également recommandé la saisine du Président de
l’Assemblée Nationale, par le Président de la République, Chef de
l’Etat, Chef du Gouvernement aux fins de sa mise en accusation devant la Haute Cour de Justice,
conformément aux procédures légales appropriées. Enfin un séminaire
gouvernemental sera organisé incessamment pour examiner plus profondément les
recommandations de la
Commission de l’Inspection Générale d’Etat en vue de leur
mise en œuvre diligente. (…) Fait à Cotonou, le 10 novembre 2007
Le
Secrétaire Général du Gouvernement, Epiphane Nobimè