Politique nationale :
Des courants de pensées se liguent contre Boni Yayi
Écrit par La
Nouvelle Tribune du 17/07/2008
Le président Boni Yayi est actuellement mis en difficulté par
des regroupements sociopolitiques même contre nature qui étonnent. Par sa
stratégie, il a fini par avoir tout le monde au dos. Des erreurs politiques ?
Le chef de l’Etat est pratiquement seul contre tous aujourd’hui. En moins de
deux ans d’exercice du pouvoir, le messie d’hier qui était accueilli comme une
mangue en avril 2006 a
fini par décevoir plus d’un. Même ceux qui l’avaient porté au pouvoir ont
commencé par déchanter. Comme on dit que l’ennemi de mon ennemi est mon ami,
les pôles presque irréconciliables dans le passé ont préféré taire leurs
querelles pour se liguer contre le président Boni Yayi. Le premier miracle
s’est produit en mars dernier au palais de sports de Cotonou, quand des partis
politiques comme le Parti du renouveau démocratique (Prd) de Me Adrien
Houngbédji, le Parti social-démocrate (Psd) de Bruno Amoussou, le Mouvement
africain pour la démocratie et le progrès (Madep) de Séfou Fagbohoun et la Renaissance du Bénin
(Rb) de Soglo, pour la première fois dans l’histoire politique du pays, se sont
unis pour faire une déclaration commune contre le gouvernement. En somme, la
classe politique est en guerre contre le régime en place contre les menaces
qu’il fait planer sur les libertés syndicales et démocratiques. La gestion des
ressources publiques à des fins politiciennes était aussi au menu. En dehors de
la classe politique, on observe encore une unité syndicale contre le
gouvernement actuel. Ces derniers mois, l’opinion publique s’étonne de voir
Gaston Azoua de la
Confédération syndicale des travailleurs du Bénin (Cstb),
Pascal Todjinou de la
Confédération générale des travailleurs du Bénin (Cgtb),
Dieudonné Lokossou de la
Centrale des travailleurs du Bénin (Csa-Bénin), Georges Kakaï
Glèlè de Confédération des organisations syndicales autonomes (Cosi) en train
de marcher contre le gouvernement, alors que ces structures étaient
antagonistes dans le passé. Ces organisations syndicales ont compris qu’il faut
leur unité pour faire face au régime du président Boni Yayi qui est en train de
les conduire peut-être vers le mur. De même, la société civile composée pour la
plupart d’intellectuels est déçue et attaque le chef de l’Etat qu’il avait
pratiquement fait en 2006. Les Béninois se souviennent que cette couche sociale
avait lutté farouchement contre la révision de la Constitution qui a
favorisé l’arrivée au pouvoir du président Yayi. La dernière déclaration des
organisations de la société civile contre la vie chère est en une preuve.
Conséquences
La classe politique, les syndicats et la couche des
intellectuels sont des courants de pensées qui font et défont les pouvoirs
politiques. Ils ont un pouvoir dans l’orientation du peuple qui ne fait souvent
pas une analyse approfondie des situations. L’histoire de l’humanité en dit
long. Pendant la période révolutionnaire, le régime dictatorial de l’ancien
président de la République,
Mathieu Kérékou, a été combattu par les syndicalistes. C’est grâce à la lutte
syndicale que la conférence des Forces vives de la nation a été convoquée et a
abouti à la démocratie. De même, le régime du président Soglo a été renversé
démocratiquement en 1995 par ces couches politico sociales. Même en 2006, le
président Yayi doit sa victoire aux efforts de la société civile et d’une bonne
partie de la classe politique. Pour s’en convaincre, il a suffi seulement que
la classe politique et les syndicats commencent par se mobiliser contre le gouvernement
actuel pour que la popularité du chef de l’Etat chute drastiquement. Pour
preuve, le régime en place a dégringolé aux dernières élections communales et
municipales. C’est dire qu’il faut s’assurer du soutien de la classe politique,
les syndicats et le monde des intellectuels pour avoir la maîtrise du pouvoir,
sinon le président Yayi risque de gouverner debout, c’est-à-dire qu’il va gérer
uniquement des crises jusqu’à la fin de son mandat au détriment des défis de
développement. Mais pour l’heure, le chef de l’Etat est sur la mauvaise piste.
Peut-être qu’il faut changer.
Jules Yaovi MAOUSSI