Sans fioriture :
Yayi Boni n’a
pas dit ça 29 janvier 2008
Dans la culture béninoise c’est une lapalissade
d’affirmer que c’est le messager qui informe le roi qu’on l’a insulté qui a
offensé le souverain. Cet adage illustre à merveille la malheureuse sortie
médiatique du porte-parole du président de la République, Me Lionel
Agbo. Cette sortie, la deuxième du genre en deux mois d’exercice des nouvelles
charges du nouveau promu, a l’avantage d’être plus piteuse que la première et
montre au peuple béninois ce que valent certains cadres. (Excusez du peu, je
n’ai pas envie de tomber dans les mêmes travers).
Le porte-parole était bel et bien dans son rôle quand il
dénonçait « les dérives d’une certaine presse » qui a relayé « l’enlèvement
manqué de Pascal Todjinou », président contesté de la Cena 2008 et qui aurait mêlé
le nom du chef de l’Etat à un acte digne des régimes dans lequel, le livre
rouge a droit de cité. Oui, Me Lionel Agbo avait l’obligation de démontrer
comment des canards dans le traitement de cette information avaient pris
certaines libertés vis-à-vis des règles d’éthique et de déontologie de la
profession. A la rigueur, le porte-parole aurait dû inviter la Haute autorité de
l’audiovisuel et de la communication (Haac) et l’Observatoire de la déontologie
et de l’éthique dans les médias (Odem) à prendre leurs responsabilités en vue
de faire respecter les textes qui régissent la corporation et de renouveler
l’engagement de l’Exécutif à appuyer ces deux structures pour le renforcement
de la professionnalisation des hommes des médias. Mais, quelle n’a pas été
notre désagréable surprise de voir sur notre petit écran le sémillant Avocat au
verbe donjuanesque dans tous ses états. Il tapait du poing sur la table alors que
ses yeux jetaient des éclairs. Puis il édicta « …à partir de lundi, le
journaliste qui continuera d’écrire des inanités sans aucun fondement sans
aucune preuve, dès que nous apprendrons cela, dans certains journaux, il (le
chef de l’Etat) a décidé de prendre ses responsabilités… ». (Nous faisons
grâce du reste). Le juriste de renom doublé de politicien, Me Lionel Agbo doit
comprendre que cette portion de phrase citée supra est une dérive gravissime.
Elle éclipse littéralement tous les reproches faits par le porte-parole aux
écrits desdits journaux. Aujourd’hui et demain, l’opinion publique nationale et
internationale ne retiendra que cette menace proférée par le porte-parole
contre les hommes des médias. Même s’il est au service du premier magistrat,
tout le monde a vu comment Me Lionel Agbo a martelé la volonté de la Haute autorité de sévir
désormais de telle forfaiture. C’est peu dire que d’affirmer que la dérive de
Me Lionel Agbo est sans commune mesure avec la légèreté avec laquelle
l’information incriminée a été traitée. Puisqu’elle aura irrémédiablement un
impact négatif sur les relations entre tous les professionnels des médias et le
régime d’une part et d’autre part son électorat. Pire, les déclarations de Me
Lionel Agbo vont déteindre sur la perception qu’aura la communauté
internationale de notre presse et de notre démocratie. Laquelle démocratie
force l’admiration des grandes puissances dont leurs présidents se bousculent
au portillon de notre pays. Dans quelques jours, le président américain Georges
Bush, la Chancelière
allemande Angela Merkel et le président français Nicolas Sarkozy vont fouler le
sol béninois. Pour cela, il est incompréhensible que le président Yayi Boni
lui-même décrète le bâillonnement de la presse, de sa presse. Donc Yayi Boni n’a
jamais dit ça. N’est-ce pas ?
Maximin Tchibozo