"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

ACPE / UE :

 Lisbonne valait bien une rébellion

mercredi 12 décembre 2007

Arimi CHOUBADE

 

Qui a dit qu’ils manquaient de tripes, les syndiqués de l’Union africaine ? Les Européens l’ont appris à leurs dépends aux assises de Lisbonne. Tous solidaires derrière leur collègue d’Harare, caricaturé par la diplomatie britannique comme le pire des prédateurs des libertés publiques. Cerise sur le gâteau, un pied de nez à l’endroit des organisateurs au sujet des accords de partenariats économiques (les fameux Ape). Porté par quelques chefs rebelles autoproclamés : Wade, Konaré et bien entendu Mugabe.

Une représentation tragi-comique dont le burlesque n’a échappé à personne. Les dispositions querellées étaient bel et bien prévues dans les accords de Lomé de 2000. À l’époque, l’Omc s’était ému des raccourcis préférentiels accordés aux Africains. Une parade avait été inventée afin de revenir à la normale au bout de 7 ans ; on y sera le 31 décembre 2007. Les convives de l’Union Européenne à Lisbonne n’avaient donc aucun mérite à revenir sur la parole donnée avec autant d’effronterie.

Et Wade (encore lui), pathétique, défendant le droit à l’existence d’une industrie locale face à l’hégémonie du nord. Il suffit d’interroger le leader du Parti socialiste sénégalais sur l’industrie qui a le plus marché dans son pays depuis l’avènement du « Sopi » en 2000 : la fraude électorale, le populisme, l’instrumentalisation des institutions républicaines et la grandiloquence. Aucun des tribuns de Lisbonne ne semble se souvenir des pieuvres malfaisantes qui dévorent leurs administrations respectives. C’est bien dans les capitales africaines – pas à Bruxelles, à Paris ni à Genève – que les investisseurs privés sont soumis aux pires chantages destinés à renflouer les caisses des partis au pouvoir.

Il n’y aucune honte à s’auto flageller surtout lorsqu’il est question de relever l’imposture et l’arrogance des princes qui ne rendent jamais des comptes à leurs concitoyens. Conscients qu’ils sont de leur capacité à bourrer les urnes et à bâillonner les oppositions. La faiblesse de l’industrialisation de l’Afrique doit très peu de choses à la mondialisation. On ne compte plus les industriels porteurs de projets de délocalisation tournés en rond dans nos administrations, spoliés, escroqués puis chassés comme des malpropres. Après cela on s’étonne d’être à la remorque de la marche du monde vers le progrès.

Je vois l’ami Konaré qui s’insurge contre l’irrespect de ses interlocuteurs de Lisbonne. Crime de lèse-dictateurs que d’exiger l’application de clauses contenues dans des accords signés plusieurs années plus tôt. Or, tout le monde sait que rien ne bougerait même si le statut quo était maintenu au-delà du 31 décembre 2007a. Rien sauf les comptes dans les paradis fiscaux, les acquisitions immobilières de plaisance et les maîtresses. Ainsi va l’industrialisation d’une Afrique malade de sa gouvernance et surtout de ses princes.

On a beau lire entre les lignes, nulle part ne point à l’horizon l’alternative des rebelles de Lisbonne. Comme on s’en doute, la rhétorique n’est pas allée au-delà de la dénonciation spectacle. Heureusement que tous ne sont pas partis au Portugal pour la frime et les caméras. Les « traîtres » ont beaucoup plus pensé à leurs responsabilités nationales qu’à une collégialité de façade.

« Ainsi va l’Afrique »



14/12/2007
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