"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

Béninois, serions-nous lâches ?


On peut mille fois avoir la volonté de faire des efforts, mais il est presque impossible de ne pas être critique à l’endroit du gouvernement du Bénin. Avec le recul démocratique qui s’observe quotidiennement dans le pays le gouvernement béninois contrôle à la fois le parlement, la justice, la presse et même…l’opposition. La régionalisation à outrance du pouvoir, la prise en otage du pays par les évangélistes, la multiplication des marches injustifiées de soutien aux actions du Président de la République, les grosses affaires politico-judiciaires sans suite et l’impunité ont complètement jeté du discrédit sur ce régime. Désormais, sous nos cieux, l’Etat et la République sont tout simplement réduits en orphelins pour ne pas dire en SDF qui se débat dans une jungle politique où les prébendes et les strapontins sont devenus les principales raisons d’engagement. D’où l’ampleur et la banalisation de la transhumance alimentaire qui, non seulement a fini par réduire la politique à l’art le plus bas, mais encore par torpiller le concept de citoyenneté en le vidant de son sens, car comme l’avertissait Rousseau : "On a tout avec de l’argent hormis des moeurs et des citoyens". Pour s’en convaincre, il suffit de regarder l’actuelle classe dirigeante, tout se passe comme si personne n’hébergeait plus dans son coeur les vertus de la République et les valeurs de la citoyenneté acquises de hautes luttes et qui devraient constituer le socle fédérateur de toutes nos espérances.

Face à ce constat amer qui enfonce davantage notre pays dans les abysses de la pauvreté, ce qui peut paraître encore plus choquant, c’est l’attitude souvent indifférente, voire impassible affichée par la plupart de nos concitoyens. Le concept de la "mère-patrie" a-t-il encore un sens dans ce pays ? Eprouvons-nous encore autant de sensibilité vis à vis de notre patrie que de notre propre mère ? Serions-nous lâches, nous Béninois ? Il existe une expression cynique qui me paraît convenir à la situation : "Jouer le cadavre". Autrement dit, la solution pour beaucoup, semble être la résignation dans l’espoir qu’un miracle nous sortirait un jour de cette situation. Yayi Boni n’a pourtant pas de baguette magique et le pays émergent dont il parle n’est qu’un effet d’annonce. C’est de loin du pipeau. Tout le monde le sait mais personne ne veut le dire. A l’heure actuelle, Yayi Boni n’a pas de stratégie pour redresser l’économie du pays ! Et ce n’est pas en invoquant sans cesse le nom de Dieu dans ses discours ou en s’entourant d’évangélistes qu’il va y arriver ! Il faut avoir le courage de le dire… Ce blog par exemple qui se veut un blog citoyen, est dangereusement devenu la plate-forme expressive des membres de partis politiques du pouvoir et de l’opposition. Les commentaires qu’on y enregistre ne sont généralement que des envolées basses, politiciennes, régionalistes, ethniques, partisanes et parfois…racistes, complètement en déphasage avec le sujet proposé. Pour mes prises de positions, certains béninois malhonnêtes et malintentionnés n’ont d’ailleurs pas cherché trop loin : je suis au service d’un certain Houngbédji ou carrément au service d’une cause inavouée. Pour ces Béninois que j’appelle «les authentiques ennemis de la citoyenneté», on ne peut venir de nulle part et créer un blog au ton aussi "féroce" si on n’a pas des idées derrière la tête. Il y a donc urgence de refonder et de rétablir dans notre pays le rapport à la citoyenneté active et à la mère-patrie.

La notion de citoyenneté dépasse largement la seule appartenance à un pays. Elle vole même bien au-delà. Si elle est exercée, la citoyenneté transcende les peurs et les égoïsmes individuels et collectifs, primaires et complexes et traduit une spontanéité agissante qui place l’Etat, la République, bref les Institutions au dessus de toutes les contingences partisanes, religieuses, sectaires, ethniques, etc. En d’autres termes, devant l’intérêt national, personne n’a le droit à l’indifférence. Le peu de gens qui comprennent encore ceci et qui s’emploient sans relâche à exercer courageusement leur citoyenneté soit dans un cadre civil, politique, ou associatif sont souvent les cibles des éternels passifs qui pourtant, ne font que tourner leurs fauteuils dans le sens de l’histoire, avec cette cantique à la bouche : "la politique, ça ne m’intéresse pas !". Entendez tout simplement : " le sort de mon pays ne me préoccupe pas". Ce qui est curieux, c’est que dans cette catégorie de Béninois passifs, on ne compte pas que des analphabètes : il y a des étudiants mais également des intellectuels et des carriéristes qui ne se préoccupent que d’eux-mêmes et de leur pain. Qu’on le veuille ou non, ces derniers que je nommerai volontiers "les objecteurs de l’engagement citoyen", sont en quelque sorte d’intelligence avec les fossoyeurs de notre République contre lesquels je suis plus que jamais engagé. Sur la dégradation dramatique de l’économie, des institutions, de la démocratie, des libertés, des fleurons industriels, du pouvoir d’achat, de la morale, de l’éthique et d’autres encore, outre leurs véritables responsables au sommet de l’Etat, les citoyens passifs béninois trouveront les autres vrais coupables une fois devant leur miroir.


regardsurlebenin@gmail.com -
http://www.regard-benin.blogspot.com


23/08/2007
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