La grève largement suivie à Cotonou
17 juillet 2008
Le mouvement
de grève de 48 heures lancé par les responsables des centrales syndicales et
qui a démarré hier, mercredi 16 juillet 2008, a été largement suivi dans tous les
ministères sillonnés, donnant la preuve que les travailleurs vivent
effectivement un malaise.
L’hymne de la grève chantée par les responsables des
centrales syndicales lors de leur dernière marche contre la cherté de la vie, a
été reprise en chœur par les travailleurs des différents ministères sillonnés
dans la matinée d’hier par une équipe de votre journal. L’appel à la grève
lancé aux travailleurs par Gaston Azoua de la Cstb, Emmanuel Zounon de l’Unstb, Georges Kakaï
Glèlè de la Cosi,
Pascal Todjinou de la Cgtbb,
Dieudonné Lokossou de la
Csa-Bénin et François Houssou de la Cspib, a eu un écho très
favorable et le constat fait hier par une équipe de votre journal, est que le
mouvement de grève de 48 heures qui a démarré hier, mercredi 16 juillet 2008, a été largement
suivi. Au ministère des Mines de l’énergie et de l’eau, les agents avaient même
anticipé sur la grève générale et depuis mardi, ils ont abandonné les bureaux
et le travail pour exiger, entre autres, du gouvernement le paiement
immédiat de la prime exceptionnelle de motivation, le paiement des moins perçus
de la prime de motivation au titre de l’année 2007 et du premier trimestre de
2008. Hier mardi, ils ont durci leur position et ont été galvanisés par les
responsables des centrales syndicales. Au palais de la justice, c’était
également le calme plat. Là, les greffiers depuis trois semaines observent une
grève de 72 heures. Diane, une visiteuse rencontrée à l’entrée du tribunal et
qui devait faire établir son casier judiciaire était surprise d’apprendre que
les agents sont en grève. Le tribunal qui d’ordinaire grouille de monde ne
comptait que quelques usagers qui venaient et se retournaient. Les différents
services étaient fermés. Selon le secrétaire général du syntrajab, Désiré Sèvo,
la grève sera illimitée à partir de la semaine prochaine, si rien n’est fait
par l’autorité pour satisfaire la revendication relative à la prime de
sédentarisation. « Nous ne voulons qu’un arrêté notifiant l’engagement de
l’autorité à payer cette prime. Car, on peut nous la payer l’année
prochaine », a-t-il notifié. Le constat est le même au ministère de la Famille et de l’Enfant. La
plupart des bureaux sont fermés. Mais les syndicats, selon certaines
indiscrétions, viendront fermer ces bureaux restés ouverts. Jusqu’à 9 heures,
les syndicalistes n’étaient pas encore arrivés sur les lieux. « Mais comme
c’est une grève générale, on ne sait pas qu’ils sont en train de sillonner les
autre structures avant de venir », a fait savoir un agent de sécurité. La
directrice adjointe dudit ministère, Elisabeth Djékété, rencontrée, a reconnu
que la grève est effective, mais qu’il y a quelques agents qui sont arrivés.
« Moi je suis arrivée assister à une réunion dans une autre structure.
Mais si là-bas je ne vois personne, je vais me retourner », a-t-elle
déclaré. Il faut noter que jusqu’à 10 heures, les syndicalistes n’étaient pas
encore arrivés et quelques personnes présentes ont commencé par vider les
lieux.
Autres structures
A la Soneb,
les travailleurs ont organisé un sit-in. Cour déserte, bâtiments vides, bureaux
hermétiquement fermés. Telle est l’ambiance qui a prévalu au ministère de
l’Urbanisme de l’Habitat, de la reforme foncière et de la lutte contre
l’érosion côtière (Muhrflec) et au ministère de l’Environnement et de la Protection de la Nature (Mepn). Et pour
cause les travailleurs desdits ministères, membres du syntra-Cen, ont observé
un arrêt collectif de travail de 48 heures pour compter d’hier 16 juillet 2008,
conformément à la décision des centrales syndicales lors de leur gigantesque
marche de protestation organisée le jeudi 10 juillet dernier. Approchés,
quelques responsables syndicaux présents sur les lieux pour constater et
confirmer l’effectivité de la grève, ne se sont pas fait prier pour livrer leur
état d’âme. C’est le cas notamment du secrétaire général du syntra-Cen, Modeste
S. Toboula, qui a profité de l’occasion pour saluer le sens de discipline et de
militantisme soutenu de tous ses syndiqués qui viennent ainsi, selon lui, de
joindre l’acte à la parole. « Les camarades ont observé le mot d’ordre à
100%. Et ce sera ainsi à chaque semaine jusqu’à entière satisfaction de nos
différentes revendications », a-t-il martelé. Il est à noter que même les
contractuels de ces ministères ne sont pas du reste. Ce qui, d’ores et déjà,
laisse confirmer, l’aspect général à ce débrayage.
Géant meeting
La Bourse du travail a été le cadre choisi
par les ténors de la grève pour galvaniser les militants. Ils ont répondu
présent à cette rencontre d’information tenue ce mercredi. Gaston Azoua comme
il fallait s’y attendre a, le premier, pris la parole pour dire au chef de
l’Etat de négocier « si tant est que sa munition est finie ». Il
a annoncé dans les jours à venir, des marches pour contraindre le gouvernement
à satisfaire les revendications qui se résument : à la hiérarchisation des
salaires des travailleurs des secteurs privé et parapublic suite au relèvement
du smig intervenu depuis 2003 ; au relèvement du smig à hauteur de 25%dans
la fonction publique ; à la suppression de la Tva sur la facture
d’électricité et d’eau ; la prise d’autres mesures d’ accompagnement aux
fins de préserver le pouvoir d’achat des populations en général et des
travailleurs en particulier puis l’ouverture sans délai des négociations. Dans
le slogan nous irons jusqu’au bout du monde, Gaston Azoua a prédit qu’il va
naître bientôt les centrales patriotes et que des syndicalistes seront victimes
d’intimidations. Il a invité les travailleurs à rester soudés afin de gagner la
bataille. Au Conseil national des travailleurs, les centrales syndicales ont
exigé que la revendication première à savoir la hiérarchisation des salaires
des travailleurs des secteurs privé et parapublic soit prise en compte avant
qu’ils ne siègent à ce conseil qui aura lieu lundi prochain. Dieudonné
Lokossou, Emmanuel Zounon, Georges kakaï Glèlè, Michel Kissi, l’adjoint de
Todjinou, ont tour à tour galvanisé le moral des travailleurs. Georges Kakaï
Glèlè secrétaire général de la
Cosi, la centrale qui regroupe plus de syndicats du secteur
hospitalier, a annoncé pour l’avenir des grèves sans service minimum. Dieudonné
Lokossou a dans son intervention, marqué sa solidarité aux journalistes qui
sont selon lui, persécutés et harcelés. Il a dénoncé les grogneurs qui accusent
les centrales syndicales de ne pas être au rendez-vous du forum. « Nous
sommes dans un état de droit et on ne doit pas nous obliger à faire ce qui
heurte notre conscience », a dit Dieudonné Lokossou à l’endroit des
grogneurs.
Les privés dans
la danse
Le secrétaire général de la Centrale syndicale des
secteurs privé et informel du Bénin (Cspib), François Houssou, signataire de la
motion de grève adressée au gouvernement a accepté de faire le point de la
grève au sein du secteur privé et dire clairement ce qu’il attend du
gouvernement. « Le mouvement a été observé à la Société des ciments du
Bénin pas comme dans la fonction publique. J’ai informé depuis la veille mes
syndiqués que seul l’ensachage sera arrêté de 8 h à 12 h. Les travaux
d’ensachage reprennent à 12 heures. Mais tous les autres services à
savoir : l’administration, les magasins, le garage, le stockage et les
dépôts, ont vaqué normalement à leurs activités comme d’habitude. La grève nous
concerne et on ne peut jamais rester en marge de celle-ci. On s’est entendu
avec les autres entreprises pour faire de telle sorte que le secteur ne soit
pas totalement paralysé. Donc si une entreprise observe la grève le matin, une
autre l’observe le soir. C’est comme cela que nous avions procédé, parce qu’il
faut reconnaître que nous sommes en baisse de production et nous ne voulons pas
aussi pénaliser les entreprises. Notre vœu est que le gouvernement hiérarchise
le salaire des travailleurs des secteurs privé et parapublic suite au
relèvement du smig intervenu en 2003. D’ailleurs la Banque mondiale dans son
dernier rapport sur le Bénin, recommande de revoir les salaires à la hausse, ce
que nous réclamons. Mais pourquoi le gouvernement se refuse d’appliquer cette
recommandation ? Les conclusions issues du forum ne peuvent que nous
rassurer que lorsque le gouvernement aurait élaboré un chronogramme précis de
mise en œuvre en collaboration avec les centrales syndicales. Je déplore
également l’organisation expéditive de ce forum qui n’a pas du tout été
préparé. C’est la gigantesque marche des travailleurs qui a inspiré
l’organisation d’un tel forum. Tout porte à croire que rien ne se prépare et
tout se décide à la hâte. Ce n’est pas du tout bon. Trop de conseils nuisent au
chef de l’Etat. Les conseillers dirigent même les ministres. Il faut que le
chef de l’Etat diminue le nombre pléthorique de conseillers », a-t-il conclu.
RA