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Déclaration de l’Union nationale des magistrats du Bénin (Unamab)

suite à la décision du conseil des ministres du 12 octobre 2007 relative à la suspension de l’exécution des décisions de justice ayant pour objet les déguerpissements et les démolitions. A l’issue de la réunion qu’il a tenue le 12 octobre 2007, le Conseil des ministres a rendu publique une décision par laquelle il a :
- d’une part, suspendu « l’exécution de toutes décisions de justice ayant pour effet les déguerpissements et les démolitions des bâtiments d’habitation en milieu urbain »

- et d’autre part, annoncé la création d’un organe en vue du« règlement pacifique et équitable des litiges domaniaux ». Le mardi 23 octobre 2007, le bureau exécutif de l’Union nationale des magistrats du Bénin (Unamab) a été invité à une séance de travail présidée par le Président de la République, à laquelle il a pris part aux côtés, entre autres, du Président de la Cour suprême, des ministres chargés de la Justice et de l’Intérieur et des responsables des ordres professionnels de la justice. En raison de la complexité de la situation, le Bureau exécutif de l’Unamab a juste relevé au cours de cette rencontre, que la décision du conseil des ministres du 12 octobre 2007 manquait de base légale, en attendant d’en référer à l’Assemblée générale des magistrats pour faire connaître la position de l’Unamab sur la question. Suite à l’Assemblée générale tenue le mercredi 24 octobre 2007 au palais de justice de Cotonou, l’Unamab porte à la connaissance de l’opinion publique ce qui suit :

1) En ce qui concerne la rencontre organisée le 23 octobre 2007 par le Président de la République, l’Unamab regrette qu’elle n’ait pas précédé la décision de suspension de l’exécution des décisions de justice prise par le conseil des ministres, ce qui aurait sans doute permis d’explorer d’autres voies pouvant aboutir à une exécution apaisée desdites décisions, à la fois respectueuses de la Constitution du Bénin et des autres lois nationales, puis de l’intérêt de nos concitoyens, tout en préservant l’ordre public.

2) En ce qui concerne la mesure de suspension de l’exécution des décisions de justice elle-même, l’Unamab relève qu’elle constitue une atteinte aux principes de la séparation des pouvoirs, du droit à la propriété privée, de la garantie de l’exécution des décisions de justice par le Président de la République, principes énoncés respectivement aux articles 125 alinéa 1er, 22 et 59 de la Constitution du 11 décembre 1990. En effet, l’exécution des décisions de justice relevant du domaine judiciaire, le gouvernement, en prenant une telle décision, s’immisce dans ledit domaine. Cette immixtion a pour conséquence la violation du droit de propriété reconnu par des décisions de justice ayant acquis autorité de chose jugée dont pourtant l’exécution doit être garantie par le Président de la République en vertu de l’article 59 de la Constitution. Au-delà de cette immixtion, n’est-ce pas la fonction de juger elle-même qui est remise en cause ? A quoi sert-il donc de rendre des décisions si elles ne doivent pas être exécutées ? L’Unamab attire par ailleurs l’attention du gouvernement sur les inconvénients de sa décision qui risque d’engendrer plus de troubles à l’ordre public, de créer une situation d’insécurité juridique et judiciaire, de faire primer le fait sur le droit et de confiner les personnes en défaveur desquelles les décisions de justice sont rendues dans une illusion en définitive préjudiciable à leurs intérêts. Cet état de choses n’est de nature, ni à préserver les acquis de notre démocratie, ni à rassurer les investisseurs dont l’intervention est indispensable pour l’avènement d’un Bénin émergent.

3) S’agissant de la mise en place projetée d’un organe chargé du « règlement pacifique et équitable des litiges domaniaux », l’Unamab exprime sa vive préoccupation quant à sa légalité en ce que la justice ne peut être rendue que par les cours et tribunaux créés conformément à la Constitution, comme le prescrit l’article 125 alinéa 2 de la Constitution, repris par l’article 7 de la loi 2001 - 37 du 27 août 2002 portant organisation judiciaire en République du Bénin. Eu égard à tout ce qui précède, l’Unamab compte sur la compréhension du gouvernement pour éviter le recours à l’arbitrage d’autres institutions et à toutes actions qu’elle jugera nécessaires relativement aux développements ultérieurs de la situation.

Fait à Cotonou, le jeudi 25 octobre 2007

L’Assemblée générale extraordinaire de l’Unamab

 



26/10/2007
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