"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

Dissidence dans la majorité présidentielle :

 Que peut le G13 contre Boni Yayi ?


Écrit par La Nouvelle Tribune du 26/02/2008   

La fronde politique des députés du G13 est montée d’un cran ces derniers jours. A travers une série de meetings et de déclarations, le pouvoir du changement est devenu la cible de nombreuses attaques. De quels atouts disposent ces dissidents de la majorité présidentielle et quels peuvent être les moyens dont Boni Yayi peut se prévaloir pour les contrer ou les contenir ?

 

Les députés dissidents de la majorité parlementaire, réunis au sein du G13, se sont déchaînés contre le régime de Yayi. Ils ne ratent plus aucune occasion pour donner de la voix. Après l’hémicycle le vendredi dernier, ils se sont retrouvés à Glazoué le samedi pour faire le procès du gouvernement devant les populations. Il n’en faut pas davantage pour que leur soit collé l’étiquette de nouveaux opposants. Par ces temps où l’opposition constitue une denrée rare au Bénin, c’est avec plaisir et grande joie qu’on les verrait s’inscrire totalement dans ce registre, ne serait-ce pour combler le vide laissé béant par leurs nouveaux amis, qui s’efforcent toujours à se faire accepter dans la majorité présidentielle . Mais le discours de ces dissidents n’augure malheureusement pas de l’avènement d’une classe politique de type  nouveau, capable de tenir sur le long terme, un discours basé sur une vision éclairée, susceptible d’apporter un bémol au monolithisme de fait qui caractérise de plus en plus la démocratie béninoise.

 

Des atouts certains

En effet, connaissant l’histoire récente du fonctionnement de la classe politique béninoise, on a de la peine à croire que tout ce bataclan irait loin. Plutôt juste une tempête dans un verre d’eau dirait l’autre. Deux choses expliquent le déchaînement de ces députés et la cascade de déclarations auxquels ils s’adonnent actuellement.

Le premier se résume dans ce que les membres du G13  appelleraient le non-respect de ses engageants par Boni Yayi. Ne trouvant pas encore leur compte dans la gestion du pays, alors qu’ils ont eu à apporter leur soutien politique au régime à un moment ou un autre, ils ont choisi de manifester publiquement leur mécontentement. Et ce ne sont pas les armes pour faire chanter le pouvoir qui leur manque. La plus prisée ici c’est bien le potentiel électoral dont chaque membre du G13 peut se prévaloir. Chacun en ce qui le concerne dispose d’un fief politique dont il est resté maître jusque là. De quoi dire au chef de l’Etat que s’il ne se décide pas à les impliquer dans la jouissance effective des fruits et des attributs du  changement, ils lui retiraient purement et simplement leur soutien.

En outre, ils refusent de se saborder dans  la Fcbe pour la constitution  des listes uniques pour les municipales. Leur crainte tire son origine de la raison précédente. En acceptant de se fondre dans le regroupement politique du chef de l’Etat, ils perdent a priori leur propre  identité politique. En cas de victoire aux élections, il n’est pas exclu que Yayi leur oppose plus tard que c’est son seul nom qui en a été l’élément déterminant. Raison de plus pour qu’il les traite davantage au gré de ses humeurs, sans qu’ils puissent avoir les coudées franches pour protester. Leur avenir politique s’en trouverait ainsi compromise. Ayant pris la mesure du danger qu’ils encourent, ils ont choisi alors d’attaquer le pouvoir de front.  

 

Du bon vouloir de Yayi

Cependant, on ne saurait perdre de vue un aspect. C’est un risque important que prennent  les membres du G13 de se mettre dans une position d’affrontement contre le pouvoir. D’abord il n’est plus un secret pour personne que nombre d’entre eux traînent quelques casseroles. Et si Yayi avait été assez ferme dans sa politique d’assainissement, il aurait réussi à les immobiliser. On retrouve également dans le  groupe plusieurs hommes d’affaires et autres cadres, convertis en hommes politiques, pour qui le Parlement constitue un refuge, pour se mettre à l’abri. S’il faut  remonter dans un passé récent et fouiller dans leurs affaires et les différentes fonctions qu’ils ont eu à occuper, on  trouverait à redire sur l’origine de leur « fortune ». A cela s’ajoute le fait que le pouvoir bénéficie d’un autre atout non négligeable : il s’agit des moyens. Face à ces membres du G13 qui se targuent d’avoir à leur actif des fiefs politiques, il peut faire la promotion d’autres leaders dans leurs propres localités, et réussir, au fil du temps,  à y affaiblir leur leadership.

En définitive,  la guéguerre politique actuelle entre le régime du changement et ses alliés du G13 n’est nullement une bataille de vision, de principe,  encore moins de doctrine. Son dénouement tient uniquement à la seule volonté de Yayi de satisfaire ou non des partenaires politiques de circonstance.  Dès le moment où ils pourront trouver leur compte dans la gestion actuelle du pouvoir, tous les incidents seront clos. Mais apparemment, Yayi  ne semble pas encore dans une telle  logique. Autant il est prêt à les utiliser pour obtenir des victoires politiques pour mieux asseoir son régime, autant il est déterminé à se débarrasser d’eux ou les garder le plus loin possible de son changement .Une équation visiblement  difficile à résoudre !  

 

Alain C. Assogba  



27/02/2008
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