"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

Emergence et redondance d’institutions budgétivores :

 Le concert des amis

mardi 11 décembre 2007

Arimi CHOUBAE

Rédigé le 11 décembre 2007

 

Un subit besoin du docteur-président de se concerter avec Moïse Mensah, l’un des tout premiers convertis au yayisme avant même que le kérékouïsme auquel il a adhéré avec emphase une décennie plus tôt ne tire sa révérence. Il parait que la gouvernance s’en trouverait plus performante. Un partage de strapontins entre amis politiques alors qu’opposants (en veilleuse) continuent de raser les murs à la recherche de la moindre parcelle de légitimité.

Quelques Béninois peuvent s’étonner de l’automaticité de la mise en application du décret de création de la haute autorité de la gouvernance concertée. Pendant que la loi portant statut de l’opposition, vieille de plusieurs années, peine à se mettre en musique. La question se pose plutôt de savoir en quoi une intelligence entre Yayi Boni et Moïse Mensah apporte de la convivialité à la gouvernance publique. Est-ce à dire que des bisbilles sont apparues entre les deux hommes depuis la fièvre de la campagne présidentielle 2006 ? Un autre patriarche recaser pour services rendus après l’ami de Djrègbé à la médiation de la présidence. Pas de procès parce qu’un « ami » du pouvoir a été élevé à une haute fonction.

Sauf que la gouvernance concertée telle que pratiquée sous le changement affiche une efficacité en pointillés. Prise en otage par les bandes annonces défilées en boucle sur les chaînes de télévision. Dignitaires religieux, enseignants, membres de la Cena et de ses démembrements, transitaires, journalistes, têtes couronnées, diplômés sans emploi, transporteurs, artisans. Le palais de peuple de la marina ne désemplit plus des différentes catégories socioprofessionnelles convoquées à la hussarde par bandes annonces télévisées.

Imaginez le spectacle de cette gouvernance concertée version changement. Une salle prise d’assaut par de milliers d’individus « pour une séance de travail avec le chef de l’Etat ». Des sortes de défouloir sans ordre du jour précis, sans document de travail, sans objectif fixé à l’avance. Le protocole obéit à un schéma immuable : un porte-parole désigné à la sauvette chargé d’enfoncer des portes ouvertes, une profession de foi d’un ministre puis la déclamation du chef de l’Etat sur sa vision et son ambition pour le pays. De la gouvernance concertée !

Le succès de ces invitations collectives auprès de fonctionnaires absentéistes ne se fait pas attendre. Pour eux, une invite du chef de l’Etat à la population, à la pose de pierre d’un édifice n’est rien d’autre qu’un jour férié. Le fonctionnaire étant compris dans la population, il est de son devoir civique de répondre à l’appel du magistrat suprême, n’en déplaise à un chef de service. Ne parlons pas de ces situations alambiquées pour transporteurs, artisans et autres concernés qui prennent la route depuis l’intérieur du pays à leurs frais espérant palper quelques kopeks au sortir des audiences populaires. Il ne reste que la satisfaction d’avoir pénétré, pour la première fois de leur vie, l’antre du palais de la République.

Gouvernance concertée ou pas, le régime politique béninois a un nom : régime présidentiel fort avec séparation nette des pouvoirs. Cela commande que toutes les institutions prévues par la constitution et les lois de la République soient expérimentées dans leurs moindres détails. Après cela, après cela seulement, peut intervenir la touche personnelle et discrétionnaire du docteur-président. Pas avant.

Le républicain passe avant le présidentiel !



14/12/2007
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