"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

Grève de 72 heures des magistrats:


Une crise sans précédent s’annonce

 

 

 

 

Écrit par L'Autre Quotidien du 12/12/2007   

 

Les magistrats observent, depuis hier mardi, une grève de 72 heures à l’appel de leur organisation, l’Union Nationale des Magistrats du Bénin (UNAMAB). Le motif de cet arrêt de travail et l’état d’esprit général au sein de la corporation des magistrats et des auxiliaires de justice suscitent bien des inquiétudes.
Apparemment, le chef de l’Etat est sur le point de connaître l’une des plus grandes crises de son quinquennat, tant il est difficile de prévoir l’issue de ce bras de fer ouvertement engagé par la corporation des magistrats. De l’avis des observateurs, le mot d’ordre de grève est largement suivi, hier mardi, sur l’ensemble du territoire national. Toutes les juridictions sont paralysées. En effet, l’Unamab avait lancé, il y a quelques jours, un ultimatum à la fois au garde des Sceaux, ministre de la Justice et au gouvernement. Au garde des Sceaux, elle a exigé des excuses publiques pour, semble- t-il, des déclarations qu’il aurait faites lors de la rentrée judiciaire de novembre dernier et au gouvernement, elle lui a demandé de rapporter sa décision qui suspend l’exécution des décision de justice portant sur le foncier dont l’effet est de déguerpir ou de démolir des habitations. A défaut de la réaction attendue, l’Unamab a décidé de recourir à la méthode forte. Les magistrats veulent ainsi faire pression sur le gouvernement pour l’amener à rapporter sa décision.Celle-ci serait dictée par des préoccupations d’ordre social, notamment pour éviter que des dizaines de familles ne se retrouvent dans la rue suite à l’exécution de ces décisions de justice. Mais les magistrats, préoccupés par l’indépendance du pouvoir judiciaire, ne supportent pas que l’oeuvre de la justice soit privée d’effet par une décision du gouvernement qui ne devrait, en aucune façon, faire entrave à l ‘exécution d’une décision de justice.

Pour bon nombre d’acteurs de la justice, la décision du gouvernement constitue une dérive inacceptable qu’il faudra arrêter dès maintenant pour éviter que l’Exécutif ne l’étende à d’autres domaines ; de sorte, qu’en définitive, l’exécution des décisions de justice ne dépende que de sa seule volonté. C’est pourquoi, la détermination semble se lire, depuis des semaines, au niveau de l’Unamab qui bénéficie du soutien des auxiliaires de justice, dont principalement les huissiers de justice et les notaires Ce qui la conforte dans sa détermination à continuer de faire pression sur le gouvernement. Pratiquement, l’unanimité se fait aujourd’hui au sein du monde judiciaire pour craindre que le gouvernement, progressivement, parvienne à s’immiscer dans le domaine réservé au pouvoir judiciaire. Lors d’une conférence de presse animée récemment par la Chambre nationale des huissiers de justice, ceux-ci n’excluent pas de recourir à des actions musclées afin de contraindre le gouvernement à rapporter sa décision. Jusqu’à quand le gouvernement peut-il résister face aux pressions des magistrats qui incarnent un pouvoir, du reste constitutionnellement indépendant, et qui envisagent même une grève illimitée pour obtenir le retrait de cette décision? Comment le pays pourrait-il, dans l’hypothèse d’une grève illimitée, fonctionner sans justice ? A peine sortie d’une longue paralysie causée par la grève illimitée et sans service minimum des greffiers, la justice béninoise se met encore sur une pente glissante préjudiciable au peu de crédit qui lui reste. Face à cette situation, seule le dialogue peut encore permettre d’éviter le pire. Par conséquent, les marches de soutien des personnes qui bénéficient de la mesure de suspension ne pourraient être perçues que comme des actes de provocations et contribuer simplement à radicaliser la position des magistrats et des auxiliaires de justice.

Apollinaire KOUTON



12/12/2007
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