L'Autre changement
La soldatesque électorale
mardi 1er avril 2008
Arimi CHOUBADE
Rédigé le 1er mars 2008
Encore un cran de franchi dans le processus
d’introduction de la violence au centre de la chose électorale. Le zèle
exceptionnel de militaires à travers des séances de collage d’affiches, de
largage de tracts à proximité de sites de rassemblement de concurrents aux
listes du chef de l’Etat, de posture d’éclaireurs des cortèges électoraux, on
l’a découvert à l’occasion des législatives 2007. De l’exfiltration
spectaculaire et brutale de membres de la Cena et de ses démembrements sur simple
dénonciation de la Fcbe,
c’est du nouveau. Ceux qui voulaient connaître l’innovation de la brutalité
légendaire du régime du changement, version municipales, ils sont servis.
50.000 cartes d’électeurs suspectés avoir été volées. Le simple fait que le
lièvre ait été soulevé par un émergent vaut affaire d’Etat, largement suffisant
pour faire intervenir les gros bras des forces spéciales de la police.
Sans être expert en procédure, on sait qu’il n’y
a vol qu’en cas de soustraction frauduleuse d’objets appartenant à autrui. Dans
le cas d’espèce, le propriétaire demeure la Cena qui ne reconnaît toujours pas avoir perdu
quelque chose. Le voleur présumé est membre d’un démembrement au niveau
départemental donc agent assermenté du propriétaire. Finalement c’est le
propriétaire qui se trouve accusé de s’être volé ou d’être le complice d’un de
ses agents assermentés sur dénonciation d’une tierce personne. Je préfère
laisser les procéduriers professionnels de démêler cet écheveau.
Ce qui est moins drôle par contre, c’est la
violation intempestive et de plus en plus grotesque des franchises de la Cena par un gouvernement
pourtant garant du bon fonctionnement des institutions. On oublie que les
membres de la Cena
sont sous serment et ne rendent compte qu’au terme de leur mandat. Aucune
structure administrative ne détient un pouvoir de contrôle à priori sur elle.
Elle dépose son rapport d’activité en fin de mandat. Et alors seulement, peut
intervenir le contrôle à posteriori. Des policiers ne sauraient investir le
siège de la structure en charge de l’organisation des élections afin de
procéder à des vérifications de stocks. Cela n’exclut pas que la force publique
soit sollicitée par les autorités de la
Cena elles-mêmes en cas de menaces provenant de l’extérieur
comme un vol par exemple.
L’usage qui est fait du matériel électoral par un
membre de démembrement relève du contrôle interne de la Cena. Le dénonciateur
Djitrinou aurait pu savoir qu’il est plus un obligé de la Cena que de la présidence de la République qu’il
n’aurait jamais dû faire intervenir la présidence de la République dans cette
affaire. Ici le fonctionnement n’obéit pas aux règles classiques de
l’administration publique. La
Cena est une commission ad hoc d’organisation d’une élection.
Elle met en œuvre les stratégies qui lui paraissent aptes à faire tenir un
scrutin le plus juste possible. Le président Ced-Littoral devrait comprendre
qu’il n’existe donc aucune hiérarchisation structurelle rigide entre lui et un
simple membre du démembrement. Ce n’est pas parce qu’il a décidé de créer la pénurie
à Cotonou et qu’il est le président de la Ced que ses autres collègues laissent passer.
L’enjeu est de savoir si Solange Capo-Chichi,
Didier Doubogan et consort sont sérieusement ébranlés par la traque policière
pour se soustraire à leur rôle de vigilance, ouvrant un large boulevard à
d’autres manœuvres. Djitrinou et commanditaires n’attendent que çà.