Lutte contre la corruption :
ON tourne toujours en rond
Le Bénin depuis les indépendances cherche des moyens pour lutter contre
la corruption qui détruit près de la moitié des ressources à consacrer à
d’autres activités de développement. 47 ans après, le ver est toujours dans le
fruit. L’état des lieux présenté par l’Inspecteur général d’Etat hier lundi 10
décembre 2007 à la direction des impôts et des domaines en dit long.
L’espoir
n’est pas encore permis au Bénin dans la lutte contre la corruption même si des
engagements du nouveau pouvoir laissent transparaître une volonté de faire
reculer le mal. L’impunité, un des freins à la réussite de la lutte, est encore
monnaie courante. Il faudra, selon Mme Anne Cica Adjaï, Présidente de la Cellule de moralisation
sous le régime du Président Mathieu Kérékou, entreprendre la lutte en trois
étapes : la prévention que les actuels dirigeants occultent, et qui est
nécessaire pour que le citoyen sache ce qu’il faut faire et ce qu’il ne faut
pas faire. Ensuite, il faut la détection du phénomène et, enfin, il faut
nécessairement réprimer. Or, c’est à ce dernier point que tous les coups se
jouent. Plusieurs dossiers ont été objet d’enquête sous le présent régime mais
rien n’a été fait en ce qui concerne les poursuites. Il faut oser, a dit un
citoyen même si les fautifs sont proches du Chef de l’Etat. Le parlement doit
pouvoir mettre à la disposition de la justice les députés cités dans des
affaires, clamait la veille le Président de l’Observatoire de lutte contre la
corruption, Jean Baptiste Elias. Au cours de son exposé hier, l’Inspecteur
Général d’Etat M. Jacques Alidou Koussé a reconnu qu’avec les anciens
régimes, des commissions d’enquête ont été diligentées, à commencer par le
Président Hubert Maga. Mais ces enquêtes n’ont pas connu de suite judiciaire.
Il a cité la commission d’enquête et de vérification des lendemains de
l’indépendance, la commission de vérification des biens présidée par le
professeur René Ahouansou créée en 1989 par le Président Mathieu Kérékou ;
la commission Amoussou Kpakpa au lendemain des recommandations de la conférence
nationale de février 1990 ; une autre commission a vu le jour en 1995
avant la création de la
Cellule de moralisation de la vie publique en 1996.
L’histoire retient aussi que la concertation des 26,27 et 28 mars 1998 des
organisations de la société civile invitées par le Président Kérékou a abouti à
la naissance du Front des organisations nationales de lutte contre la
corruption (Fonac). Enfin, il y a eu aussi en 1999, la commission présidée par
M. Adrien Ahanhanzo Glèlè. De toutes ces commissions, il n’y a eu que le
dossier de la Sonacop
qui ait connu une saisine de la justice. C’est pour cela que plusieurs
participants à l’exposé de M. Koussé ont demandé que la lutte sous le
gouvernement de Boni Yayi aussi ne s’arrête pas à des commissions de
vérification pilotée par l’Inspection générale d’Etat qui remplace aujourd’hui
la cellule de moralisation de la vie publique et les autres structures. Il faut
que l’impunité s’arrête et que les dirigeants actuels aient le courage de
poursuivre en justice les fautifs même s’ils étaient des proches ou amis du
pouvoir. Car, selon l’inspecteur général d’Etat, « il y a suffisamment de
textes pour lutter contre la corruption si le besoin se fait sentir ».
Dans la Constitution,
dans le code des marchés publics, dans le code pénal, il y a des moyens de
poursuites, a-t-il précisé. Toutefois, pour mieux avancer dans cette lutte, le
parlement doit faire diligence pour voter la loi sur l’enrichissement illicite
et la loi anti corruption. En plus de l’engagement fait par des organisations
de la société civile, des syndicats, dans la soirée au palais des congrès de
Cotonou, il faut associer les confessions religieuses à la lutte contre la
corruption au niveau de la prévention. Enfin, chaque Béninois depuis le village
jusqu’au gouvernement, doit se considérer comme un acteur de lutte contre la
corruption et changer sa mentalité. Tant qu’il y a la corruption, il y a des
corrompus et des corrupteurs. Et personne ne peut s’y soustraire, car, il y a
des gens qui en bénéficient tous les jours ou encouragent de façon insidieuse
et de plusieurs manières. Du chemin reste donc à faire au delà des marches et
des déclarations d’intention, même si certains pensent qu’il faut des cellules
de lutte contre la corruption dans tous les services et sociétés.
Guy
Constant Ehoumi