"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

Propagande présidentielle :

Les paroles portées

Rédigé le 22 novembre 2007, par Arimi CHOUBADE

 

  Elles sont si lourdes qu’il en faut plusieurs pour les porter. Un au gouvernement, un autre à la présidence. Le premier, un apparatchik moulé dans le kérékouïsme. L’autre un activiste grandiloquent, ancien opposant. Des styles aux antipodes, caractéristiques d’une diarchie qui en rajoute au mélange des genres d’un système de plus en plus difficile à cerner. Alexandre Hountondji porte-parole du gouvernement, Lionel Agbo, porte-parole de la présidence.   On peut se réjouir pour le célèbre pénaliste de trouver désormais costume à sa taille en attendant mieux. Porte-parole de la présidence est certainement mieux valorisant qu’un banal membre d’une instance de régulation des télécommunications dont l’existence ne sert qu’aux polémiques et aux manipulations d’un secteur pris dans la turbulence des intérêts croisés. Une promotion qui perd pourtant de son éclat du fait de la confusion mentionnée tantôt. Me Agbo est bien placé pour savoir que constitutionnellement, le système politique béninois n’admet aucune espèce de détachement entre le gouvernement et la présidence. On voit mal, sur un même sujet, la présidence de la République exprimer une parole différente de celle du gouvernement.   En France, l’Elysée se fabrique son propre porte-parole autre que celui du gouvernement. Parce que les deux organes ne prennent pas leur légitimité à la même source. Le gouvernement repose sur la majorité parlementaire alors que le chef de l’Etat tire sa légitimité du suffrage universel direct. Il suffit d’une grave crise qui divise le parti au pouvoir en France, l’Ump, pour que Sarkozy perde de sa superbe et soit réduit exclusivement à son domaine réservé, la diplomatie et la défense. Cette cohabitation de légitimités justifie que chaque entité détermine sa visibilité. Ce qui n’est pas le cas au Bénin.   Dans le cadre d’une gestion purement patrimoniale de l’établissement présidence de la République, il est loisible de nommer une pléiade de courtisans, l’un pour s’occuper des véhicules, l’autre pour surveiller la présence des agents au poste, un autre pour la cuisine, un autre pour les toilettes, un autre pour les salles d’audience etc. Mais sur un plan institutionnel, l’éventail est strictement réduit. Puisque la présidence de la République est confondue au gouvernement (exécutif), selon la Constitution. Dans un présidentialisme à la béninoise, la désignation d’un porte-parole de la présidence, c’est-à-dire quelqu’un qui peut parler au nom du chef de l’Etat ou qui exprime sa pensée crée un dévoiement du régime. Un président bis en somme.   Une autonomie politique de la présidence par rapport au gouvernement n’a pas lieu d’être. Puisque le gouvernement c’est le chef de l’Etat. Il le nomme, le révoque à sa guise sans recourir à la chambre comme en France ou en Grande-Bretagne. Un porte-parole du gouvernement est déjà celui de la présidence, de même qu’un secrétaire général ou de tout autre machin de ce genre. Notre système ne reconnaît d’ailleurs aucune légitimité politique à un ministre, encore moins à un conseiller du chef de l’Etat pas plus à son porte-parole qui ne sont ni l’un ni les autres responsables de rien devant aucune institution de la République. Néanmoins, le pouvoir de nomination du chef de l’Etat ne souffre d’aucune restriction en la matière. A lui d’ouvrir la mangeoire à qui il veut comme ce fut le cas au Médiateur de la présidence.   Bon appétit cher Maître !



23/11/2007
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