"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

Yayi Boni


UN ETRANGE JUSTICIER

16 Juillet 2007 In http://regard-benin.blogspot.com/-Qu'ils soient apprentis ou confirmés, les despotes au cours des siècles, ont tâché de prouver qu'ils étaient l'aboutissement définitif de l'histoire. Tant leur pouvoir était si immense qu'ils en abusaient à loisir, tant était si grande la résignation stoïcienne de leurs peuples qu'ils se croyaient investis d'une mission divine et providentielle. Aujourd'hui, au vu des actes qu'il pose au quotidien, tout porte à croire que Yayi Boni marche dans cette logique d'autant qu'il incarne moins le symbole de la patrie que celui de sa division, moins un démocrate qu'un dictateur comme nous le rappellent souvent ses proches.


Avec ce régime dit de Changement et largement plébiscité par les Béninois en 2006, la justice béninoise est profondément retombée dans ses travers de dépendance politique. Notre Président décide désormais de qui va être inculpé, incarcéré ou libéré. Son engagement personnel dans l'affaire Gbadamassi, du nom de l'ex-maire de Parakou ainsi que la persécution continue à laquelle le député Issa Salifou avait fait l'objet de sa part sont encore vivaces dans les mémoires. Yayi Boni avait ouvertement demandé la démission du député et du maire pour des prétextes complètement ridicules et fallacieux. L'immunité parlementaire, il s'en fout. Aucun magistrat n'a pu se saisir de ces affaires. Le Président les a réglées tout seul par l'arbitraire. Si l'élection d'un député relevait des prérogatives du chef de l'Etat ce dernier aurait destitué la moitié des députés au lendemain de son élection. Le pouvoir exécutif n'a jamais aussi bien acquis le contrôle de tous les contre-pouvoirs. Yayi Boni déstabilise redoutablement la justice, il dirige subrepticement le législatif et contrôle financièrement les médias. On ne peut rien faire aujourd'hui au Bénin sans passer par le Président de la République. Même en tant que proches collaborateurs, la marge de manœuvre des ministres est souvent réduite à néant. Tout se passe dans le pays comme si cette forme d'accaparement de tous les pouvoirs par un seul homme est tout à fait normale. Le premier magistrat béninois pratique ouvertement une justice à deux visages. Il vire les fonctionnaires selon ses humeurs alors que dans son propre camp tout ne semble pas sans reproche.


L'autoritarisme !

L'image de symbole de la lutte contre l'impunité qu'il ne cesse d'afficher se révèle être de la poudre aux yeux au regard de l'injustice qui la caractérise. Y a-t-il justice lorsqu'on licencie des subalternes d'unité parce que la lumière a flanché au cours d'un séminaire au moment où le chef de l'Etat lit son discours ? Cette manière de faire n'est ni plus ni moins que de l'autoritarisme. La justice veut que si licenciement il y a, qu'il frappe également tous les supérieurs hiérarchiques. Mais ici il ne devrait même pas avoir licenciement dans la mesure où le délestage intervient dans un contexte de délestage généralisé dans le pays. L'image d'homme ferme et juste que revendique Yayi Boni, est une image tronquée, hypocrite. Sa justice est une justice à sens unique, une justice arbitraire qui ne frappe que les plus faibles. Pourquoi Yayi Boni n'a-t-il pas pipé mot depuis que le monde entier sait que des leaders de Force Cauris pour un Bénin Emergent (FCBE) que sont Célestine Adjanonhoun et Luc Da Matha occupent aujourd'hui l'actualité pour fait de mauvaise gestion au moment où ils étaient directeurs de la Société Béninoise de l'Energie Electrique (SBEE) ? Quand on prétend qu'ils vont bientôt être entendus par l'Inspection Général de l'Etat (IGE), une inspection qui officie à la présidence, on est bien en droit de croire que le Chef de l'Etat se moque du peuple. Qu'a-t-il jusqu'ici fait des résultats des audits des ministères qui ont pourtant révélé une liste impressionnante d'agents permanents de l'Etat impliqués dans des malversations financières ? Rien sinon que de la propagande. Chercher à la loupe un petit domaine où, par extraordinaire, ce régime n'a pas fait de dégâts en un an, est une niaiserie et une perte de temps. Vouloir défendre le contraire devrait demander de grands efforts dialectiques et démagogiques dont seuls Edgar Guidigbi et consorts semblent avoir le secret. La mauvaise gouvernance est donc inexorablement en marche au Bénin et il serait bien dommage que les Béninois ne s'en rendent compte que des années plus tard, quand il sera évidemment trop tard.


regardsurlebenin@gmail.com -

 

Suspension des députés Sant'Anna et Adjanohoun :
Les insuffisances juridiques de la requête

[16 juillet 2007] In Le Matinal -La requête du chef de l'Etat relatif à la suspension des députés Célestine Adjanohoun et Luc da Matha Sant'Anna afin de permettre à ces deux députés de se mettre à la disposition de l'Inspection générale de l'Etat (Ige) continue de faire des vagues. A la lecture des textes, la requête de la Haute Autorité comporte des insuffisances qui bloquent Yayi Boni dans son combat pour la moralisation de la vie publique. ...


Quelle suite donner à la requête du chef de l'Etat qui vient de demander la suspension des députés Célestine Adjanohoun et Luc da Matha Sant'Anna, précédemment directeurs de la Société Béninoise de l'Energie Electrique (Sbee) ? La question préoccupe sérieusement leurs autres collègues au Palais des Gouverneurs à Porto-Novo, au regard du caractère très sensible du dossier. Surtout que les textes actuels ne permettent pas de procéder aussi facilement à la suspension de ces deux députés des activités du parlement, comme le souhaite le premier magistrat du pays.


En effet, le président de la République souhaite que les députés Célestine Adjanohoun et Luc da Matha Sant'Anna soient mis à la disposition de l'Ige pour répondre des faits qui leur sont reprochés dans l'affaire de malversation portant sur le marché de gré à gré de plus de trois milliards qu'ils ont passé avec une société au moment où ils étaient à la tête de la Société Béninoise de l'Energie Electrique (Sbee).


Mais dans la pratique il n'existe pas dans le Règlement Intérieur de l'Assemblée nationale, encore moins dans la constitution du 11 décembre 1990, des dispositions adéquates pour répondre efficacement aux attentes du chef de l'Etat. On parle simplement de la levée de l'immunité parlementaire du député selon des conditions bien précises. Ainsi, au terme de l'article 70 du Règlement Intérieur de l'Assemblée nationale, l'immunité parlementaire peut être levée dans les cas tels que celui de délit ou de crime flagrant lorsque le député, auteur, co-auteur ou complice de l'infraction poursuivie, aura déjà été ou non arrêté et détenu, ainsi que dans les cas de délit ou de crime lorsque des poursuites doivent être engagées contre le député, auteur, co-auteur ou complice d'une infraction, dans les cas de délit ou crime, lorsque les poursuites engagées contre le député auteur, co-auteur ou complice de l'infraction sont provisoirement suspendues. Des situations qui sont bien contraires aux cas des députés Célestine Adjanohoun et Luc da Matha Sant'Anna. Aucun d'eux n'est pour le moment auteur, co-auteur ou complice de crime ou de délit. Car il faut le souligner les accusations du Fonac, de Alcrer et même de la commission mise sur pied par le chef de l'Etat pour voir clair dans ce dossier ne sont rien que de simples actes de dénonciations qui n'ont encore aucune valeur juridique et donc ne lie personne. Mieux, le dossier tel qu'il se présente pour l'heure est à sa phase purement administrative et a besoin d'autres dispositions de droit avant le recours de l'Assemblée nationale. Pour régler le problème sans violer les textes de la République et porter atteinte aux droits des intéressés, le chef de l'Etat devrait comprendre que l'Inspection Général de l'Etat (Ige) ne peut pas pour le moment gérer le dossier de ces deux parlementaires.


Leur suspension dans les conditions actuelles n'est pas aussi conforme aux textes du pays. Les députés Célestine Adjanohoun et Luc da Matha Sant'Anna peuvent être autrement écoutés sans être suspendus des travaux parlementaires comme cela a été le cas du président du parti Union pour la Relève (Upr) le député Issa Salifou il y a quelques mois sous la quatrième législature. C'est lorsque après cette étape, si les accusations contre eux sont fondées que le gouvernement peut se saisir du dossier et impliquer alors l'Ige au processus et même déposer un recours au procureur de la République qui a tout le pouvoir requis pour demander la levée de l'immunité parlementaire des concernés.

Mathurin Nago très embarrassé

C'est le vendredi passé, soit plus de 24 h après la réception de la requête du chef de l'Etat que le président de l'Assemblée nationale Mathurin Nago a montré la correspondance à ses collègues Célestine Adjanohoun et Luc da Matha Sant'Anna. Une source crédible affirme que la question a fait l'objet de longs et houleux débats à la conférence des présidents la veille. Situation qui a obligé le président Mathurin Nago à éviter de faire passer la lettre dans les communications de la plénière du vendredi dernier. Mieux, il aurait évité de notifier la requête aux intéressés et serait contenté juste de leur faire lire la lettre du président Yayi Boni. Simplement parce que la situation actuelle a plusieurs implications qui obligent le bureau de l'Assemblée à s'assurer au préalable de bonnes garanties avant d'agir.


D'abord, la majorité qui a élu le bureau de Mathurin Nago a déjà commencé par s'effriter avec la formation du nouveau gouvernement du Changement. Et la crise à l'issue de laquelle Me Hélène Aholou Kéké a été portée à la tête de la commission des lois, de l'administration et des droits de l'homme est une raison suffisante pour Mathurin Nago, d'éviter de prendre des décisions « à la sauvette ». Plusieurs députés de la mouvance présidentielle ont désormais d'autres intérêts à défendre et semblent ne plus être trop liés par leurs accords avec le gouvernement. Dans les mêmes conditions, certains d'entre eux sont plus que jamais tenus de rester fidèles au chef de l'Etat, quoi que cela leur coûte. Un ensemble de complications qui empêchent de prendre une décision à la hâte sur le sujet. C'est pourquoi le président Mathurin Nago prend assez de recul avant de prendre une position. Cette requête bien embarrassante de Yayi Boni pour Mathurin Nago doit obliger ce dernier à se coller efficacement aux textes de la République tout en s'armant politiquement. Et pour réussir ce combat et rester en harmonie avec les uns et les autres, des séminaires de formation de mise à niveau sont nécessaires pour l'équipe du président Nago car nombre d'entre eux n'ont encore aucune idée du fonctionnement de l'Assemblée Nationale et de ses organes.

Jean-Christophe Houngbo





16/07/2007
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