14 juillet 2008 - Le Béninois Libéré
Projeté sur le devant de la scène
politique, à l’issue du scrutin de mars 2006, Boni Yayi, au vue de la
difficulté que représente la gestion du puit à histoires qu’est le Bénin, était
comme quelqu’un projeté par-dessus bord en haute mer. Mais tout pouvait lui
arriver sauf mourir de soif. Naufragé, il avait en abondance l’eau et il lui
suffisait seulement de savoir en faire usage en attendant que la providence ne
l’aide dans la traversée. Elu avec 75% des suffrages, Boni Yayi est sincèrement
le mieux élu de l’histoire du Bénin. Il pouvait se réjouir dès lors de
l’adhésion de l’immense majorité des Béninois à sa politique. Mais que ne fut
pas sa surprise ! Au fil de son quinquennat, tout semble se rebeller
contre lui. La nature en premier. Puis les hommes en second. L’actuel chef de
l’Etat n’a certainement pas su jouer en utilisant tous les faveurs dont il a
bénéficié. Mieux que ces prédécesseurs, le docteur Boni Yayi en accédant au
pouvoir en mars 2006, avait l’avantage d’avoir à calquer son Changement sur deux
modèles. Le premier, Nicéphore Dieudonné Soglo, qui a incarné cinq ans durant,
de 1991 à 1996, la réussite économique. Il a su insuffler à la République du Bénin une
prospérité économique qui, s’il n’avait pas été très vite éjecté du pouvoir,
allait mettre le Bénin au niveau du concert des Dragons économiques. Boni Yayi
qui a eu le privilège de travailler au côté de celui-ci comme conseiller à
l’économie, avait été comme à bon école. Le second, Mathieu Kérékou, a lui, su
imprimer au Bénin un climat de paix, de cohésion sociale caractérisée par une
cohabitation positive et pacifique entre membre de la classe politique
béninoise appartenant à de tendances diverses. Sans avoir collaboré directement
avec ce régime, Boni Yayi avait aussi comme un privilège, une lecture des
détails et des astuces de ce grand homme politique. Avec ces deux exemples,
l’actuel président avait tout pour réussir son quinquennat au double point de
vue réussite économique et maintien de l’héritage de la cohésion sociale. Mais
pourquoi diable assistons-nous sous Boni Yayi à la déconfiture de ces deux
héritages, même si tout porte à croire que les deux cohabitent
difficilement ? La raison se trouve, après analyse, dans la politique de
direction du Changement. Les conseillers de Yayi, tous attachés aux privilèges
relatifs à leurs postes, ont préféré appuyer dangereusement leur chef dans ses
décisions au lieu de lui faire part de leurs observations réelles sur les
enjeux de l’heure. Dans ces conditions, on ne peut plus dire que Boni Yayi est coupable.
D’où le vocable ambiant de : il est mal conseillé. Pour combien de
temps ? Et c’est là que le docteur Boni Yayi dans sa nouvelle quête de
politique qui intègre les deux exigences de réussite économique et de gestion
dans la paix totale, va devoir revoir aussi bien son équipe gouvernementale que
les membres de son cabinet au Palais. Dégager les béni oui-oui et autres
comédiens du Changement. Ce n’est qu’à cette seule condition qu’il pourra se
frayer le chemin de la vérité et de la lucidité pour débattre efficacement des
questions du pays. Ce n’est aussi qu’à cette condition que Boni Yayi pourra
réussir à faire face aux récurrents problèmes de la chèreté de la vie, de la
crise politique, en l’occurrence celle du Parlement, et des autres bobos qui fragilisent
sa gestion. La chèreté de la vie à laquelle le Bénin, à l’instar des autres
pays, est confronté n’est sûrement pas une fatalité et peut être à tout moment
affronté avec des armes dont Boni Yayi n’est pas pauvre. Une rencontre sincère
et à coup sûr fructueuse avec les anciens, Kérékou, Soglo, et ses adversaires,
Houngbédji, Amoussou, Saley, Idji, Fagbohoun, Sèhouéto et les autres serait
toujours la bienvenue pour que chacun apporte de sa contribution pour boucher
la jarre trouée. C’est cela le forum dont nous avons besoin pour faire face à
la crise.
Aboubakar TAKOU |