L'éditorial de l'Abé
Le pouvoir personnel
Le caractère excessivement personnel du pouvoir
démocratique au Bénin est tellement englobant que le courage intellectuel et
politique de le penser comme un problème de société et de tenter de le résoudre
semble manquer aux acteurs publics. Nul ne peut ignorer que le charisme
personnel de l'homme politique est indispensable surtout en cet âge de
construction médiatique des personnalités publiques. Et dans une société comme
la nôtre où presque tout se joue primordialement sur la force du réseau social,
il ne faut guère s'attendre à ce que la question du pouvoir personnel soit
articulée ici comme dans une autre culture démocratique. Mais comme on a pu le
constater encore, lors des dernières élections communales et locales, les
politiciens béninois ne posent pas leurs candidatures et ne battent pas la
campagne électorale sur la base de projets de société. Pire, de clubs
électoraux autour de certaines personnalités politiques qu'ils ont toujours
été, les partis politiques sont fragilisés et émiettés maintenant plus que
jamais. Et quand on ajoute à tout cela cette utilisation systématisée des
fibres ethniques au nom de laquelle les ministres et directeurs de sociétés
publiques sont des agents politiques de l'Exécutif dans chacune de leur région
de provenance, alors tous les excès sont à craindre.
A cet effet, l'expérience du régime actuel est
particulièrement instructive. Elu à une majorité historique, sans un appareil
politique réel, le président Boni Yayi apprend à ses dépens que son pouvoir
personnel ne va pas loin. Avec les résultats des dernières élections communales
et locales, des commentateurs de la vie politique appellent à la constitution
d'un gouvernement plus élargi. Alors, les faiblesses de l'appareil exécutif
actuel issu d'une coalition hétérogène de soutiens, ne feront que s'aggraver si
le G13 et même le G4 font leur entrée au gouvernement. Car, d'un côté comme de
l'autre, ce ne sont pas les personnes de valeur qui manquent, même si elles ne
suffisent pas. Ce qui manque le plus, c'est une organisation politique solide,
un système de pensée politique cohérent et une structuration de valeurs
démocratiques. La démocratie béninoise ne peut plus se contenter de pouvoirs
personnels. ça doit changer.
Abbé André S. Quenum
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