La rentrée a lieu
5 octobre, par Arimi CHOUBADE
Çà y est ! Le Bénin est
sauvé ! Écoliers, élèves et étudiants ont repris le chemin des écoles. Les
séances jubilatoires n’arrêtent plus. Congratulations, louanges, remerciements
se succèdent sur la place publique. A s’y méprendre, on se croirait revenir au
jour de la déclaration d’indépendance. On parle de victoire, de patriotisme (en
passe de devenir le mot du quinquennat), de paix, de bénédiction. Que veut le
peuple ? La joie et le bonheur.
Tout le monde aura remarqué, ces
derniers jours, ce qui reste de la qualité du débat public. Un sujet aussi
délicat que l’éducation nationale livré à la vindicte populaire. Aucun plateau
de médias n’a été mis à contribution pour tenir des confrontations d’idées.
L’ère de la succession des monologues inaugurée depuis le régime Kérékou a
connu ses heures de gloires dans cette crise de la rentrée. Représentants du
pouvoir et enseignants s’alternent sur les canaux de diffusion sans jamais se
rencontrer.
Pour être plus juste, on a beaucoup
plus entendu et vu les partisans d’une reprise, coûte que coûte, que les
autres. Bienheureux qu’il s’est trouvé quelques rares tribunes audiovisuelles
pour tenter d’établir un virtuel équilibre. Curieux spectacle que celui des
spécialistes opposés à des gens qui n’ont que pour tout argumentaire l’émotif,
le pathétique, le sensationnel ou la désinformation. C’est-à-dire d’un côté des
praticiens de l’éducation nationale, et de l’autre des politiques relayés par
des agitateurs d’opinion. À travers une représentation unique ponctuée d’un
lyrisme d’un genre particulier.
Les vrais connaisseurs de la science
de l’enseignement demandent un décalage de la date de reprise pour des raisons
évidentes d’impréparation et d’improvisation. On leur oppose une implacable
propagande d’Etat menée par un bataillon de ministres aidée d’une clameur
publique confuse. Ne parlons pas des sermons télévisés de patriarches parés de
leurs plus sacrées reliques et du bain forcé infligé aux petits élèves et
écoliers en soutien au président de
Aucune importance qu’on utilise des
jeunes déscolarisés sans le moindre rudiment pédagogique dans des salles
pléthoriques et insalubres. Oublié l’échec scolaire massif de la dernière année
académique. Pourvu que la rentrée se fasse. On croyait le temps des générations
sacrifiées révolu. Hélas ! A de demander si l’opération consiste à
satisfaire des parents d’élèves pressés de rejeter la besogne de l’éducation de
leur progéniture sur les enseignants ou s’il s’agit de l’avenir d’enfants
livrés à l’incompétence avérée de ceux chargés d’appliquer les programmes
d’enseignement.
Les classes ont repris et déjà tous
les regards sont tournés vers la prochaine crise. On ne refera pas l’histoire.
A présent, l’émotionnel peut se tasser enfin et laisser la place à un véritable
débat, cette fois-ci sans artifice et sans faux-fuyant. Réclamer deux semaines
de formation pour des enseignants contractuels locaux dépourvus de toute
formation ne menace aucun régime et par ricochet aucun portefeuille
ministériel. Le monopole de l’amour paternel ou filial n’est souvent pas du
côté que l’on croit.
Nous sommes tous Béninois !
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