"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

Marcher et

Grever toujours

mardi 26 février 2008

Arimi CHOUBADE

rédigé le 26 février 2008

 

Çà grève en rond pendant que ça marche en soutien. Les deux Bénins qui se côtoient presque sans se voir. L’un en émergence et l’autre en rogne. La situation a le mérite de la clarification. Il y a un pan du pays dont le changement n’en a pas besoin. Enseignants, étudiants, infirmiers, conducteurs de véhicule administratif, du poids mort, inutile, marginal. On se rend bien compte que les grévistes comptent pour du beurre dans la stratégie globale. La caste des débrayeurs s’ajoute à celle des opérateurs économiques marginalisés complètement réduits à l’inaction. Tant que quelques hommes d’affaires étrangers habilement enrôlés arrivent à s’accaparer les rares projets d’envergure tout va bien. Tant mieux si les nationaux ferment un à un boutique sous les coups de boutoirs d’une inquisition fiscale orientée. Des réservistes de la longue marche émergente. En souvenir de la longue marche du Timonier de l’Ouest.

Voilà deux ans que je cours après la boussole de commandement du régime. En vain. Sa dissection nous aurait permis de monter en épingle la part de chacun (travailleurs, étudiants, ouvriers, opérateurs nationaux en rade) par rapport à l’horizon vers lequel Yayi Boni et son équipe conduit le pays. Je finis progressivement par me résoudre au constat, à mon corps défendant, que ce doucement n’a jamais existé. Comment penser un seul instant que le changement que l’on dit si élaboré puisse manquer ainsi d’une structuration crédible, attestée par les citoyens ?

Les marcheurs, par contre, démontrent chaque jour leur importance au sein du dispositif. Eux parviennent, presque sans forcer, à obtenir l’ouie de la « haute autorité » alors que des syndicats officiels peinent à s’offrir un brin de son précieux et divin temps. N’eut été l’annonce de l’arrivée aux portes du pays du géant planétaire Georges W. Bush, les infirmiers n’auraient certainement pas obtenu l’entrebâillement des portes du palais de la Marina. Les convenances ne supporteraient pas que l’homme le plus puissant du monde viennent parler de sida pendant que le personnel de santé observe une grève sauvage, sans service minimum.

A voir de près le mode de fonctionnement du changement, le mépris des nouveaux princes vis-à-vis des forces sociales en rogne se justifie amplement. Le grand chef ne peut-il pas tout ? Et n’est-il pas capable du miracle ? Sa faculté de substitution aux agents sur le terrain à travers son exceptionnel don d’ubiquité lui offre une marge de manœuvre infinie. Puisqu’il peut être à plusieurs endroits à la fois et trouver solution à tout, à lui tout seul. Dommage pour les conducteurs de véhicules administratifs. Eux, franchement, peuvent faire grève toute l’année si cela les chante. A moins qu’ils parviennent à rallier à leur cause les pilotes d’hélicoptères présidentiels. On en est assez loin pour le moment.

Les grévistes se relaient sur les petits espaces encore disponibles dans les médias se plaignant d’avoir été ignorés par les invitations présidentielles qui défilent régulièrement en bandes annonces en bas des petits écrans. Ces célébrissimes convocations à l’improviste, populistes, sans ordre du jour précis et qui ne débouchent généralement sur aucune visibilité concrète. Le grand manitou préfère de loin le brouhaha de la salle du peuple bondé d’applaudisseurs aux réunions entre sachants où on discute virgule par virgule sur des dossiers non moins doctes. Pour le reste rendez-vous sur le terrain à travers meetings et bains de foule – l’opium du changement.

Continuer toujours…



26/02/2008
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