"LE BLOG DU Pr JOËL AÏVO"

Révolution verte

Les paysans, des partenaires ?

mardi 20 mai 2008

Arimi CHOUBADE

 

Le mensonge n’a pas couru trop longtemps sur les causes de la vie chère. Même l’instrument d’obscurantisme le plus connu en matière de gouvernance publique, la Cedeao, a fini par reconnaître que les populations doivent leur calvaire actuel à leurs gouvernements respectifs. Incapables qu’ils sont de consacrer ne serait-ce que 10% de leurs budgets à l’agriculture. Malgré toutes les proclamations à l’endroit d’un secteur pourtant pourvoyeur de l’essentiel du bétail électoral.

De l’agriculture véritable, ces gouvernements n’en connaissent que la rente et l’argent facilement mobilisable. Celui du Bénin sait bien qu’il ne réussirait jamais à se faire prêter 14 milliards en 2006 s’il n’avait exhiber en garantie la manne supposée du coton. Une illusion de la prospérité par la rente que le changement n’a pu inverser. Au contraire. Jusqu’au jour où les céréales importées ont commencé par faire défaut et on s’est rendu compte que non seulement le coton se produit mal mais il ne peut remplacer la pâte de maïs et l’igname pilée dans les assiettes des citoyens.

Et visiblement, les nouveaux princes du Bénin n’ont pas encore pris la mesure de la calamité. Le pouvoir continue de prioriser les célébrations et les incantations au détriment d’une rupture nette avec le mépris dont la paysannerie est l’objet depuis des décennies. Dernière illustration de ce mépris, la nomination d’un conseiller spécial à l’agriculture, à contre-événement, au détour d’une illumination en plein discours présidentiel. Aucun dirigeant aussi éclairé qu’il soit n’oserait jamais faire pareille chose à des médecins, à des enseignants, à des journalistes ou à des militaires sans une concertation préalable avec des représentants de la corporation concernée.

Les agriculteurs béninois n’ont de droits que durant les moments d’instrumentalisation électoraux. Ou lorsqu’ils sont en mesure de faire fleurir le maximum de cotonniers dans les champs afin qu’intermédiaires et autres officiels puissent s’assurer de substantielles ristournes. Malheureusement, le processus de transformation du paysan béninois longtemps attendu n’est toujours pas à l’ordre. Une transformation qui aurait permis de démentir Sarkozy dans sa théorie de l’homme africain qui ne se serait suffisamment projeté vers son avenir. Tout le monde sait que s’il y a quelque chose à changer dans le pays, c’est bien notre manière de produire. Pas en imposant des solutions préfabriquées du genre importation de machines agricoles inappropriées et inadaptées. La première transformation passe par une lutte contre l’analphabétisme et l’ignorance. Un paysan instruit saura trouver par lui-même la technique culturale convenable à son goût et à son milieu. L’initiative du pasteur Njamujo à travers son institut Songhaï ne vise justement qu’à faire reculer les frontières de l’empirisme au niveau de la culture vivrière.

Le producteur de maïs ou de manioc n’a-t-il pas le droit de devenir lui aussi un acteur économique capable d’analyses, de choix et d’initiatives fondées sur la connaissance des choses du monde de la modernité ? Où doit-il se contenter de courir les couvents et autres sociétés secrètes à la recherche d’une bonne récolte ? Ces gens ont un rôle à jouer pour éviter à des fonctionnaires d’abandonner le bureau pour s’aligner au soleil à la recherche de quelques kilos de céréales ?

Question au docteur-président.

 



20/05/2008
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